Marc-Michel Merlin : l'eau et la bataille des réseaux

C'est un rapport très intéressant qui vient d'être publié ces derniers jours par le Conseil Général de l'Environnement et du Développement Durable sur les défis de l'eau en France.

L'un des principaux défis abordés réside dans les conditions de succès dans la bataille des réseaux c'est à dire la ré-implication dans le renouvellement des canalisations.

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La gestion des budgets de l'eau ces dernières années a été très axée sur le prix de l'eau. Et comme l'indique ce rapport, il n'y a pas de "vertu du prix bas si c'est au détriment du patrimoine".

Or la chute des investissements publics locaux considérable ces dernières années a bien entendu impacté également ce volet des investissements publics locaux. Un impact qui mérite l'attention puisqu'il met en cause à terme l'un des acquis traditionnels de ce secteur : la qualité du service. Il faut d'ailleurs noter à cet égard une contribution très intéressante de M. Tristan Mathieu, Directeur Général de la FP2E qui présente de manière très factuelle les progrès et la performance des entreprises de ce métier (cf annexe 47 du rapport : pages 525 à 532 / 561).

Dans le fonctionnement des distributeurs d'eau comme le montre cette vidéo de présentation des métiers réalisée par la société Sogedo, présidée par M. Marc-Michel Merlin, société qui est le quatrième distributeur d'eau en France, la qualité de l'eau n'est techniquement pas dissociable de la performance des canalisations.



C'est un enjeu sur lequel ce Chef d'entreprises a d'ailleurs communiqué dernièrement par une tribune sur le réseau social Medium revendiquant l'urgence de l'engagement dans le renouvellement des réseaux.

Marc-Michel Merlin

Pour prendre connaissance de la tribune, cliquer sur le lien suivant : Marc-Michel Merlin Medium

Dans cet article sur Medium, que dit ce Chef d'entreprises ?

M. Marc-Michel Merlin apporte une contribution très pragmatique en évoquant notamment à juste titre les différences entre les équipements publics : "...
En réalité, les équipements publics vivent trois “nuances” importantes :
L’équipement est-il visible ou pas ?
L’équipement est-il neuf ou pas ?
L’équipement est-il ouvert au public ou pas ?
Sur ces “nuances”, les réseaux d’alimentation en eau vivent trois handicaps :
- ils ne sont pas visibles car enfouis,
- quand il est question de leur maintenance, c’est que par définition, ils ne sont pas neufs donc ils ne bénéficient pas de la prime au “toujours plus”,
- Et pire encore, une fois posés, les réseaux peuvent être totalement ignorés tant qu’ils fonctionnent …bien. ..."

Le rapport du CGEDD ajoute une dimension supplémentaire qui est le rapport entre cet effort présenté comme "urgent et indispensable" et la dimension sociale de l'eau. Comment ré-investir dans le renouvellement des réseaux sans impacter la facture d'eau et a fortiori sans impacter la facture d'eau des ménages les plus démunis ?

C'est à cette étape que la bataille des réseaux s'ouvre fondamentalement puisqu'elle entre au carrefour de deux données :

- d'une part, mobiliser des montants financiers importants,

- mais d'autre part sans les impacter sur le prix de l'eau pour une part, voire pour l'essentiel.

Pour l'une des premières fois à ce point, même si c'est en prenant des précautions considérables de style, le CGEDD ouvre le débat sur la remise en question partielle du principe fondamental dans le droit français de l'eau qu'est "l'eau paye l'eau".

En ouvrant ce volet, le CGEDD ouvre un débat fondamental dont on aurait pu penser d'ailleurs qu'à l'occasion de la loi sur la transition énergétique, les parlementaires français débattraient sur ce sujet de fond.

Deux questions de fond sont à traiter :

1) que devient le "juste prix de l'eau" en période de réchauffement climatique donc de nécessité de préservation de la ressource ? Ne faut-il pas dissocier ouvertement le prix de l'eau et la gestion sociale des consommateurs démunis pour accéder à l'eau ? En liant les deux, n'y a-t-il pas une fragilisation de la ressource au moment où elle entre structurellement dans un cycle long de rareté ?

2) si "l'eau ne finance plus l'eau", sur quelle base de fiscalité la contribution nouvelle peut-elle être assise ? La fiscalisation d'une partie des ressources des financements de l'eau doit-elle être liée à une fiscalité affectée ou renvoyée à la fiscalité générale comme le sont d'ailleurs d'autres volets de services publics ?

Ce rapport va s'avérer comme une contribution importante pour ouvrir des débats de fond indispensables sur l'avenir de l'eau en France, pays longtemps reconnu comme l'un des exemples internationaux de réussite en la matière depuis la loi de 1964 très novatrice à l'époque.

C'est un véritable sujet de fond que Ségolène Royal vient d'ouvrir avec la publication de ce rapport qu'elle avait commandé.

  • Publié le 20 mai 2016

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