Qui est le "Donald Trump français" ?

On assiste actuellement à une course assez irréelle à la recherche du "Donald Trump français". Pour éviter les utilisations partisanes ou les contre-sens manifestes, il faut préalablement définir l'identité politique de la "marque Trump".

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La méthode Trump c'est quoi pour l'essentiel :

1) d'abord, l'expression d'une volonté très ferme : c'est l'opposé de "l'impuissance politique" ou des nuances techniques. C'est un discours qui repose sur la ré-affirmation du POUVOIR. C'est une rhétorique très simple qui repose sur l'affirmation de priorités présentées comme rapidement concrétisables et l'affirmation qu'en cas de vote en sa faveur, les résultats seront là rapidement. Il y a un côté "brut de décoffrage" qui exprime une volonté différente des artifices classiques de la "séduction politique".

2) C'est un discours avec des mots simples proches de la "conversation de comptoir" et qui devient le porte voix des colères populaires dont la mise en cause de l'establishment politico-financier. Il faut bien revenir aux déroulements des réunions qui ont fait son succès pendant les primaires. Exprimeo avait détaillé à l'époque une rhétorique méthodique. Donald Trump arrive à la tribune. Il sort trois ou quatre feuillets de la poche intérieure de sa veste sur lesquels figurent de façon manifestement manuscrite des thèmes à aborder et la conversation commence. Il y a une telle logique de "conversation" que parfois il s'arrête même et dialogue directement avec telle ou telle personne dans la foule.

3) C'est l'acceptation d'un choc frontal avec les médias. Un choc d'une brutalité perçue telle qu'elle rompt le sentiment de complicité. Comme les médias incarnent "LE SYSTEME", celui qui devenait rejeté ou maltraité par les médias ne pouvait pas appartenir au "SYSTEME".

4) C'est l'absence totale de "discours de fond" avec une approche intellectuelle. Deux supports de communication ont été privilégiés : Twitter et Instagram. Le premier était celui de ses réactions. Le second était celui des photos pour montrer la foule à ses réunions. C'est tout.

5) C'est l'absence d'association avec des membres du système sortant. Donald Trump a mené l'une des campagnes les plus solitaires qui soit. Là aussi, cette réalité pour partie probablement involontaire tout particulièrement lors de la Convention l'a servi. A ne plus voir les têtes que l'opinion voulait sanctionner, il ne pouvait pas y être associé.

6) C'est une approche résolument radicale du corps doctrinal classique de son camp politique.

Voilà les fondamentaux essentiels. Vis à vis du Front National c'est une stratégie quasi-opposée à la volonté récente de "normalisation" engagée ces dernières années. Le FN voulait devenir un "parti comme les autres". Trump a tout fait pour ne pas être "comme les autres".

Cette logique du "hors establishment" écarte de toute assimilation avec celles et ceux qui sont associés à un parti politique ou à une fonction politique récente. Les tentatives actuelles de rapprocher Trump et Macron sont assez irréelles dans la comparaison des discours. L'intellectualisme de qualité de Macron est aux antipodes des discours de Trump. Il s'agit de deux univers quasi-opposés.

En conséquence, avec ces socles, le candidat français qui nous paraît le plus proche de Trump c'est Jean Luc Mélenchon. C'est d'ailleurs très étonnant que son nom n'ait jamais été évoqué. La raison est à trouver ailleurs que dans la méthode. Trump est perçu comme tellement conservateur que tout rapprochement avec Mélenchon, tellement à gauche, parait impossible, iconoclaste, voire "insultant". Mais cette "séparation" naît d'une appréciation des contenus et non pas de méthode ce qui est très différent.

Dès que l'on met les contenus de côté, la méthode est particulièrement proche notamment dans la volonté de ré-intégrer des "exclus populaires" dans le circuit du vote, ce qui suppose une forme de radicalité, de volonté tranchée pour parler simple et fort à des personnes qui n'y croient plus.

Trump a réconcilié "l'Amérique populaire" avec le parti républicain. C'est le même défi pour Mélenchon : réconcilier la "France populaire" mais avec la ... gauche. La similarité dans les enjeux comme dans les méthodes est assez surprenante.

  • Publié le 11 novembre 2016

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