L'eau : le vrai test d'écoute de la ruralité pour le Gouvernement d'Edouard Philippe

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Aujourd'hui, avec le vote des volets de compétences eau et assainissement de la loi NOTRe, c'est le vrai test du soutien à la ruralité pour le Gouvernement d'Edouard Philippe.

FRANCE-USA/

Il existe une indiscutable « école française » de l’eau qui a été établie comme référence internationale. Sur quoi repose cette « école française de l’eau » ? Pour une grande partie, historiquement, sur la loi de 1964, texte fondateur, qui en reconnaissant six entités territoriales distinctes avec une logique de grands bassins versants, permettait, via les Agences financières de l’Eau, de respecter la diversité territoriale. Et pourtant, cette époque était très éloignée des lois de décentralisation. Elle était officiellement dominée par un esprit de planification unificatrice. Mais, sur ce sujet, les pouvoirs publics ont intégré immédiatement qu’en la matière une loi devait respecter la réalité des territoires pour être efficace.

Plusieurs années plus tard, des contrats de plans d’Agences Financières ont même promu la notion d’unités territoriales de proximité parce que ce sont des bassins techniques qui répondent à des critères très précis d’identités locales. Ainsi, comment une Commune de montagne peut-elle être traitée comme une Commune urbaine ? Comment une Commune touristique de Provence soumise à une forte pression de population pendant 3 mois d’été au moment où la ressource peut se raréfier peut-elle être traitée comme une Commune de plaine sans le moindre choc d’évolution de sa démographie ?

Ces réalités du terrain ne peuvent être ignorées.

De même, il n’est pas possible de mettre dans le même cadre l’urbain et le rural. Ce sont deux entités totalement différentes. Presque deux métiers différents au sein de celui de la distribution de l’eau.

Dès le printemps 2016, le rapport Pointereau au Sénat a mis en relief cette réalité.

A cette époque, il ne pouvait être question d’un « piège politique » puisque la majorité sénatoriale était persuadée à cette date de devenir la … future majorité présidentielle. C’était l’expression politique d’un constat de bon sens.

L’Association Nationale des Elus de Montagne a exprimé une position identique de bon sens. De même pour la Fédération Nationale des Elus Ruraux.

Que défendent ces élus ?

1) Ces dernières années, la politique de l’eau en France a déjà connu des contre-sens graves à l’exemple du débat sur le prix de l’eau ou de la loi Brottes. Qui peut défendre sérieusement que protéger une ressource naturelle fragile, a fortiori avec les actuels changements climatiques, peut intervenir qu’à la condition de s’engager dans une course permanente au moindre prix pour un budget qui représente aujourd’hui moins de 1% du budget familial en moyenne, un pourcentage stable sur les 10 dernières années ? Et a fortiori quand tant d’enjeux forts ne connaissent pas une réponse à la hauteur des défis comme des responsabilités européennes majeures qui seront à assumer dans un calendrier proche ? La loi Brottes est devenue une "galère" pour la gestion de très nombreuses régies.

2) C’est comme les tableaux régulièrement publiés établissant des comparaisons sur la base d’une sorte de prix uniforme ayant valeur à distinguer ceux qui géreraient bien (les prix les plus bas) et les autres. C’est un raccourci tellement trompeur qu’il ne résiste à aucun examen sérieux. La comparaison brute des prix est dépourvue de toute signification tant cette comparaison devrait intégrer des aspects techniques multiples.

3) Un territoire unique de gestion de l’eau c’est à terme un intervenant unique avec un prix unique : ces deux étapes à venir sont destructrices pour les Communes rurales. L’enjeu de l’intervenant unique va ouvrir des compétitions considérables, altérant d’autant dans le temps l’émulation des concurrences possibles. Et le prix unique, c’est l’injustice garantie puisque le prix doit être le reflet de très nombreux facteurs techniques qui varient considérablement selon les territoires.

4) La gestion de l’eau dans le rural doit être un enjeu de proximité. Il faut accepter de regarder la réalité des métiers et, à ce titre de bon sens, mettre en place deux cadres juridiques différents (urbain / rural). Donc rendre la compétence aux Communes.

Aujourd'hui avec l'enjeu du transfert des compétences eau et assainissement c'est le test concret pour le Gouvernement d'Edouard Philippe de sa capacité et de sa volonté à écouter la ruralité.

  • Publié le 17 avril 2018

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