Carlos Ghosn : la présomption de culpabilité

  • Frédéric Amblard
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« Innocent until proven guilty » a peut-être été traduit par erreur en japonais par « Guilty until proven guilty ». C ‘est effectivement une autre conception de la présomption d’innocence telle que pratiquée dans nos contrées.

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Carlos GHOSN a été inculpé, non pas pour fraude fiscale, comme parfois mentionnée dans la presse, mais pour avoir signé des documents de référence de Nissan dans lesquels ne figuraient pas des montants importants qu’il aurait pu éventuellement toucher après son départ de Nissan.

La défense de Carlos GHOSN va s’attacher à démontrer que ces montants n’avaient pas à y figurer dans la mesure où leurs versements futurs (voire même leurs montants) n’étaient pas certains (ce n’était pas une retraite chapeau). Sa défense tentera également de faire valoir que des autorités japonaises (eh oui !) et des conseils japonais avaient confirmé que ces montants pouvaient ne pas être déclarés dans ces documents de référence. C’était très certainement le but recherché par Carlos GHOSN, sinon mieux aurait valu les toucher tout de suite et de manière irrévocable.

Carlos GHOSN a d’ailleurs peu de chance de toucher un Yen des montants mentionnés … comme quoi le versement de ces sommes n’était vraiment pas certain.

… et pour tout cela, il passera probablement, au minimum, un total de 60 jours en garde à vue plus une longue détention provisoire avant son procès pour ensuite pouvoir purger sa peine en prison.

Les exemples d’énormes scandales de fraudes dans certaines grandes entreprises japonaises sans qu’aucun de leurs dirigeants n’ait passé la moindre journée en prison interpelle le français que je suis sur l’impartialité de la démarche à l’encontre de ce grand patron.

Le Japon (Nissan, le parquet, le gouvernement, …) ne peut pas se permettre qu’il soit innocenté. Imaginez le désastre d’un Carlos GHOSN innocenté après 60 j de garde de vue et plusieurs mois de détention provisoire qui ressort libre, l’air blafard, 20 kg en moins … Le Samouraï qui renait de ses cendres … et qui aurait alors toute la légitimité pour faire ce qu’il avait prévu de faire : limoger Hiroto SAIKAWA et faire absorber Nissan par Renault pour en finir avec cette attelage trop intuitu personae qu’est l’Alliance Renault – Nissan -Mitsubishi.

Pour s’assurer de la culpabilité de Carlos GHOSN devant la justice, même japonaise, il faut absolument trouver quelque chose qui assurera la victoire et permettra de maintenir ce fameux taux de 99,9% (seule 1 personne pour 1000 inculpées par le procureur est innocentée après son passage devant un juge) ! Les juges et les procureurs doivent quand même bien s’entendre…. Au passage, le métier d’avocat de la défense doit être assez frustrant avec un taux de réussite de 0.1%. Je salue ici leur abnégation et leur motivation. C’est la méthode 6 sigma, chère aux Japonais, chantre de la qualité mais appliquée ici à la présomption d'innocence …. Mais là c’est un peu moins fun.

Carlos GHOSN ne ressortira probablement pas avant très très longtemps car, après la non-déclaration des sommes, le procureur ira à la pêche pour abus de bien social en saucissonnant sa pêche en plusieurs parties.

Pendant ce temps, drapé de son outrance, Hiroto SAIKAWA feint l’ignorance, preuve de son innocence, et s’attache à devenir calife à la place du calife …

La partie n’est pas gagnée pour lui mais au moins il n’est pas en garde à vue.

Même si Carlos GHOSN aimait probablement trop l’argent, cela est bel et bien un coup monté par Nissan avec la complicité locale … A Renault et son actionnaire de référence de défendre les intérêts de Renault et de la France dans cette histoire….

Contribution de M. Frédéric Amblard

  • Publié le 18 décembre 2018

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