Alexandria Ocasio-Cortez et la prime actuelle à la radicalisation

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Alexandria Ocasio-Cortez est fondamentalement un pur produit des "années Trump". Une période qui, sous l'impact de nombreux facteurs, connait des tournants majeurs. Des tournants qui dépassent de très loin la seule démocratie américaine.

Alexandria Ocasio Cortez 26 12 18

Des aspects pittoresques du candidat Trump ont contribué à cacher excessivement des tendances de fond qui dépassent et de loin la seule politique américaine.

La première leçon c’est que la faiblesse des partis traditionnels ne peut plus être ignorée à un moment donné. Aux Etats-Unis, l’alerte date de 2010 avec la première émergence du Tea Party. Cette alerte n’a cessé de prendre de l’importance de 2010 à 2016 du côté des Républicains. Chez les Démocrates, le vrai militantisme est ailleurs qu’au sein du … Parti Démocrate. Ce sont des associations militantes extérieures au Parti Démocrate qui font vivre le militantisme à “gauche” : MoveOn.org, Occupy Wall Street, …

Il y a un moment où la faiblesse des formations politiques classiques ne peut plus être sous-estimée parce qu’elle ouvre des contournements possibles.

C’est la seconde leçon, Donald Trump c’est fondamentalement la première OPA sur un parti politique classique. C’est une leçon majeure pour les formations extérieures à la politique. A partir de quel moment un mouvement politique classique peut-il être investi par une personnalité extérieure dotée de militants qui peut de ce fait prendre le pouvoir à l’intérieur même d’un parti ? A l’extérieur du Parti Républicain, Trump savait qu’il plafonnerait à 8 % au mieux. A l’intérieur du Parti Républicain, avec le label officiel, Trump s’assurait 38 % au pire. 30 points d’écart ! Les primaires deviennent le cadre juridique des OPA.

Pour parvenir à cette OPA, Donald Trump a changé les règles de la compétition. Il est sorti des codes du Parti Républicain. Comment ? En transformant les réunions publiques en discussions privées comme dans la salle à manger : mêmes sujets, mêmes mots, même absence de sujets tabous … Et les militants ont adhéré. Prendre une feuille de papier. Jeter 4 à 5 thèmes et parler devant 5 000 personnes comme s’ils étaient connus de longue date. Voilà la disruption majeure dans les primaires.

Puis, quatrième leçon, le rôle des médias. Ils doivent faire vivre l’exposition permanente puis structurer le regard de l’opinion. L’exposition permanente est le préalable. A cette fin, ils doivent disposer de la matière qui booste les audiences puisque les médias se nourrissent des audiences. Hier, Reagan avait inventé la “photo du jour”. Trump a mis en oeuvre la “polémique du jour”. Et cette logique a fait exploser les débats de fond. Par sa périodicité journalière, elle a neutralisé les analyses sur l’irréalité de certains sujets. Trop de polémiques tuaient les polémiques mais maintenaient l’exposition médiatique.

Cinquième leçon, personnaliser à fond le débat. Puisque les partis politiques sont fragilisés, le vrai repère doit être la marque qu’est le nom du candidat. Dans cette logique, il faut donc personnaliser à fond la communication de la campagne. Le parti politique devient une coquille juridique et non plus un cadre idéologique. En fin de course d’ailleurs à Cleveland, le Parti Républicain, preuve supplémentaire de sa faiblesse, a alors calqué son programme sur celui de … Donald Trump et non pas l’inverse.

Enfin, sixième leçon, le rejet des politiciens professionnels. L’argument est simple. Il est double : qu’ont-ils résolu ces dernières années ? Rien alors pourquoi reconduire ceux qui sont à la source des problèmes en étant incapables de les résoudre ?

Dans des opinions qui passent de moins de moins de temps à penser à la politique, l’argument fait mouche.

Ces 6 leçons impactent toutes les démocraties occidentales. Ces tendances de fond structurent désormais les démocraties occidentales. Et les candidats les ont intégrées. Alexandria Ocasio-Cortez est dans la lignée immédiate de chacune de ces tendances. Et avec un changement majeur : Alexandria Ocasio-Cortez revendique ouvertement sa radicalité. Pourquoi ? Parce que la radicalité est la garantie des vraies ruptures. Or l'opinion attend des vraies ruptures. Donc la radicalité n'est plus répulsive, bien au contraire. Une donnée très importante sur le chemin de 2020.

  • Publié le 12 janvier 2019

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