Le phénomène Ségolène Royal

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La victoire de Ségolène Royal montre, si besoin, que la présidentielle est d'abord la rencontre entre un tempérament, les circonstances et l'opinion.

Dans chaque période pré-présidentielle, la France éprouve deux tentations coutumières. La première est celle de l'imitation. La seconde est celle du frisson du neuf.

La vie politique française semble en effet préférer l'imitation à l'invention. Le dernier exemple en date réside dans la nouvelle mode de l'accession de femmes à des fonctions publiques de premier plan. L'ambiance est désormais au raisonnement suivant : après le Libéria, l'Allemagne, la Finlande, le Chili ...pourquoi une femme ne deviendrait-elle pas Présidente de la République en France ?

C'est une imitation d'ailleurs très réductrice car, dans ces exemples de pays étrangers, aucune des femmes concernées n'est parvenue à sa fonction sur la base d'un tel raisonnement. Chacune de ces femmes a un cursus distinct original qui n'est aujourd'hui transposable à aucune femme politique française.

La seconde tentation est celle du frisson du neuf. Avant chaque élection présidentielle française, l'enjeu consiste à trouver le schéma qui perturberait les rapports de forces classiques.

Jusqu'en 2002, dans cet esprit, la mode était au "troisième homme" surgit "d'ailleurs" c'est-à-dire ni de la principale force de droite (UNR puis UDR ensuite RPR et enfin UMP) ni de la principale force de gauche c'est-à-dire le PS.

Depuis 1974, chaque année précédent l'élection présidentielle a vu naître son "troisième homme". Ils eurent pour noms Michel Jobert en 1974, Coluche et Yves Montand en 1981, Bernard Tapie en 1988, le dernier en date fut JP Chevènement lors des présidentielles de 2002.

Face aux échecs cinglants systématiques de ces "troisièmes hommes", la mode est passée du "troisième homme" à la "première femme".

Cette mode s'accompagne de l'imitation et du neuf.

Il s'agit de la première femme dans les votes. Jusqu'alors des femmes ont bénéficié de belles cotes d'opinion.

Simone Veil de façon constante, Martine Aubry, Michèle Barzach ont ponctuellement occupé déjà les premières marches des sondages.

S. Royal a dépassé cette situation. Elle a bénéficié de deux changements majeurs.

D'une part, le décalage entre les repères traditionnels des politiques de 1er plan et la société est aujourd'hui quasi-total.
Les premiers ne parlent pas comme la seconde. Tout est en décalage. Le 1er terme ci-dessous est celui utilisé par les responsables politiques. Le second est celui attendu par la société. Le décalage est édifiant :
collectivité / individu,
travail / loisirs,
religion / matérialisme,
efforts / jouissance,
certitude, doute,
optimisme / angoisse,
croyance / peurs.

Cet décalage a créé un espace. Comme ce décalage est plus important que jamais, il est aussi exact que cet espace est donc plus grand que d'ordinaire.

Le second repère est que l'ambiance actuelle est aux valeurs féminines. Dans un monde d'angoisses et de précarités, la recherche d'harmonie appelle des concepts, des mots, des attitudes plus proches des valeurs féminines traditionnelles.

La victoire de S. Royal est une réelle nouvelle étape pour la vie publique française.

  • Publié le 17 novembre 2006

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