Les médecins généralistes face au choc des propositions de Terra Nova

  • Terra Nova
  • Politique De La Santé

Le "think tank" Terra Nova, proche du PS, veut refonder la gouvernance du système de santé.
Il dresse une série de propositions destinées à "réinventer" le système de santé, visant notamment à revoir sa gouvernance, dans un rapport mis en ligne jeudi sur son site Internet.

Fondé en 2008 par le député PS Olivier Ferrand, décédé en juin, Terra Nova, proche du parti socialiste, se présente comme un "think tank progressiste indépendant ayant pour but de produire et diffuser des solutions politiques innovantes".

Ce rapport de 109 pages, intitulé "Réinventons notre système de santé, au-delà de l'individualisme et du corporatisme", était en gestation depuis 2009, sous l'égide du sociologue Daniel Benamouzig.

Il préconise successivement d'agir sur l'identification des inégalités sociales de santé, la mise en place d'une stratégie de prévention, l'adaptation de la couverture maladie obligatoire et complémentaire, l'amélioration de la coordination des soins et la gouvernance du système.

C'est dans cette dernière partie du rapport, qui suggère d'"instituer l'Etat de santé", que figurent les recommandations les plus notables.

Terra Nova se prononce d'emblée pour "un Etat sanitaire fort", expliquant que "quitte à aller à rebours d'une idée répandue, notamment au sein de la profession médicale, une 'étatisation' accrue de l'administration sanitaire est aujourd'hui indispensable".

Afin de "surmonter le découplage historique entre la santé publique, l'hospitalisation et la médecine de ville", et remédier à la pluralité de gestionnaires (Etat et assurance maladie), le think tank appelle à "transférer l'administration du secteur ambulatoire de l'assurance maladie vers l'Etat, tant à l'échelon national que régional".

Terra Nova, qui estime que l'outil conventionnel actuel régissant les rapports entre libéraux et assurance maladie est "à bout de souffle", suggère de renforcer le rôle des agences régionales de santé (ARS), qui disposeraient alors "de leviers financiers propres", dans le cadre d'une "politique de régionalisation plus poussée".

En parallèle de ce renforcement des ARS, le rapport suggère d'aller au-delà de la démocratie sanitaire et des conférences régionales de santé en amorçant un "contrôle démocratique des politiques de santé" qui pourrait passer par l'instauration de "chambres régionales de santé" rattachées aux conseils régionaux et associant "l'ensemble des acteurs de santé".

AGENCE NATIONALE DE SANTE ET FDA A LA FRANCAISE

Le rapport suggère par ailleurs de renforcer les compétences ministérielles, en amorçant une réintégration des compétences exécutives actuellement dispersées dans plusieurs agences, en distinguant sans les nommer celles exerçant "des activités d'expertise scientifique [justifiant] un très haut degré d'indépendance", d'autres ayant vocation, notamment dans le domaine hospitalier, "à améliorer l'organisation ou la qualité des soins, plutôt qu'à les évaluer simplement".

Terra Nova suggère de regrouper ces dernières dans une "grande agence exécutive de l'organisation des soins, placée sous la responsabilité du ministre de la santé", qui pourrait avoir la tutelle sur les ARS.

Pour les agences scientifiques, parmi lesquelles pourraient se reconnaître la Haute autorité de santé (HAS), l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM, ex-Afssaps) voire l'Agence nationale de sécurité sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), Terra Nova suggère de les fondre dans une sorte de Food and Drug Administration (FDA) à la française.

Le rapport préconise également, face à la part croissante des dépenses de santé prises en charge par les complémentaires santé, d'instaurer une "autorité de régulation de l'assurance complémentaire santé" qui devrait "non seulement s'assurer de la solvabilité des assurances complémentaires (...) mais devrait aussi disposer de compétences techniques spécifiques au secteur de la santé".

Parmi la trentaine d'autres propositions notables, figure l'instauration d'une "agence exécutive de santé au travail", assortie du regroupement au niveau régional des services d'inspection du travail et de santé au travail.

Terra Nova propose par ailleurs d'organiser une "procédure démocratique" de définition d'un panier de soins remboursables, et de délimiter le champ d'intervention des complémentaires.

Le rapport préconise de favoriser l'association de médecins libéraux aux fonctions hospitalières et de santé publique, de diversifier les modes de rémunération des libéraux et de créer des formes de paiement à la pathologie, et de moduler la tarification à l'activité par "groupes homogènes d'établissements" distinguant notamment les centres hospitaliers locaux des centre hospitalo-universitaires (CHU).

C'est donc une logique entièrement nouvelle de la place des médecins généralistes avec une logique d'étatisation qui en font les "nouveaux fonctionnaires" de la nouvelle majorité parlementaire française. Comment les médecins généralistes vont-ils réagir face à ces évolutions majeures ?

Il en est de même pour les patients désormais considérablement limités dans leurs facultés de choix ?

  • Publié le 26 août 2012

Partagez cet article :

Exprimez votre avis :