L'union nationale (Edito 42)

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L'union nationale peut se définir comme l'adhésion largement répandue dans un groupe social à un ensemble de valeurs relatives aux modalités de la vie en collectivité. Les dernières enquêtes d'opinion laissent apparaître un vrai retour en force de cette notion "d'union nationale". La cohabitation avait initialement bénéficié de ce climat. L'idée que des forces politiques opposées pouvaient s'entendre pour conduire une politique commune sur des enjeux majeurs.

Mais la cohabitation s'est vite éloignée de cette attente pour être perçue comme une situation de blocage ou de marchandages généralisés. Au début des années 2000, la cohabitation a donc eu "mauvaise presse". Avec les actuels excès d'un pouvoir aux mains d'un seul et même parti, reprend corps le sentiment qu'une union nationale pourrait à la fois modérer les excès et permettre d'avancer.

En réalité, si l'union nationale existe déjà dans la vie politique française, c'est d'abord l'union du refus. Là il s'agirait de passer à une union pour affronter le futur. C'est une autre perspective.

Deux catégories d'unions doivent être distinguées :
- L'union-unanimité,
- L'union-contrat.

Le premier cas paraît difficilement concevable en dehors de périodes de crises particulièrement graves.

En revanche, l'union-contrat peut trouver des applications modernes intéressantes en "période ordinaire".

De quoi est-il alors question ?

L'union n'abolit pas les différences. Mais ces différences deviennent compatibles avec un contrat commun.

Ce contrat commun est alors supposé neutraliser des comportements qui "gênent" la vie politique à l'exemple des comportements suivants :
- les partis politiques campent sur des positions historiques déconnectées des enjeux modernes,
- ils utilisent des affrontements à des fins purement électorales et oublient leur fonction de pédagogie démocratique,
- ils poussent à l'intolérance et aux divisions parfois artificielles.

Bref, derrière cette approche d'union-contrat, il y a le sentiment que les partis politiques doivent cesser de ne penser qu'à la victoire ou à la revanche électorale pour s'occuper davantage du pays, de ses vrais défis, de l'avenir.

Des pays voisins ont beaucoup progressé dans cette voie. La Grande Bretagne pour lutter contre des formes de séparatismes. Plus dernièrement, l'Allemagne pour sortir d'une crise politique durable liée à la difficulté de dégager une majorité franche.

La France est peu habituée à cette approche. Sa vie politique est peu tolérante. Le réflexe contestataire est très vif. Les corps intermédiaires sont des défenseurs traditionnels de la sécurité et des acquis.
Les cyniques disent volontiers que le monde moderne c'est l'affrontement permanent des imbéciles organisés contre les intelligents inorganisés. Est-il impossible aux "intelligents" de s'organiser ?

Avant toute perspective d'union nationale doit intervenir comme étape préalable la dédramatisation des enjeux électoraux.
Deuxième étape, la vie politique doit être vécue comme un ensemble de réponses pratiques à mettre en ?uvre et non pas comme des enjeux théoriques permanents.

Si la dédramatisation et l'apport en réponses pratiques gagnent du terrain, ils préparent alors une possibilité d'union nationale.

Tant que ces deux étapes ne sont pas franchies, l'union nationale semble lointaine.

Il est certain que la présente période s'apparente de plus en plus à l'agonie d'un déséquilibre institutionnel. Mais de là à imaginer que, même dans des circonstances difficiles, le pays se préparerait véritablement à une union nationale, il y a une large marge.

Ce qui est certain c'est que les exigences de réformes imposent une nouvelle approche pour éviter le blocage permanent du jeu social.

La prochaine présidentielle aura pour enjeu important la redéfinition d'un nouveau vouloir-vivre ensemble. La réponse des français sera lourde de conséquences.

  • Publié le 30 mai 2006

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