Le retour de J. Chirac (Edito 55)

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Dans un univers en perpétuel mouvement et composé de menaces quasi généralisées, la tentation du refuge pourrait être forte et bénéficier à des responsables publics à l'expérience manifeste. Même dans un tel climat, les cotes de confiance et de popularité de J. Chirac ne sont pas au beau fixe, loin s'en faut. Pourquoi ?

Parce que le Chef de l'Etat incarne presque à l'excès le discrédit de l'action publique. Un discrédit parfois sympathique tant il peut être entouré d'un ridicule bon enfant ; mais un discrédit quand même :
- l'incapacité à formuler une vision globale de l'avenir,
- les projets dans les mots mais la concrétisation sans cesse reportée ou parfois même oubliée. Où est, parmi beaucoup d'exemples possibles, le grand chantier de l'allègement fiscal qui devait marquer le second mandat présidentiel ?
- l'absence de crédibilité et d'efficacité du pouvoir.

Ce qui marquera probablement le plus la Présidence Chirac c'est la perte de la fonction de référence de la fonction présidentielle.

C'est le terrain de la politique des "morales provisoires".

Parce que l'opinion est lassée de cette situation politique, tout retour du Chef de l'Etat pour un troisième mandat paraît désormais difficilement réalisable.

Jacques Chirac s'avèrera un Président de transition entre la conception gaullienne de la fonction présidentielle et la conception pragmatique de la nouvelle gouvernance présidentielle où le Président est désormais un modérateur garant des principaux équilibres.

Jacques Chirac a manqué deux rendez-vous majeurs :
- l'immédiat après-mai 2002 avec le défi de rassembler le pays face au naufrage des extrêmismes de gauche comme de droite. Pour la première fois, confusément alors, l'opinion a éprouvé le sentiment de ne pas être écoutée,
- l'année 2004 avec le scrutin régional qui faisait passer 21 régions sur 22 à l'opposition. Sans réponse, l'opinion a eu la certitude d'être méprisée.

Le divorce était consommé.

Pour ces raisons, le retour du Chef de l'Etat est une construction intellectuelle destinée à alimenter les pures conjectures.

La vraie question qui demeure est double :
- quel sera le positionnement de J. Chirac pendant la présidentielle ?
- jusqu'où le candidat UMP pourra-t-il s'en désolidariser sans craindre les mesures de rétorsions du dernier carré de fidèles ?

L'élection de 2007 sera une élection d'un nouveau type.

Ce sera une élection éclatée et une élection raisonnée.

Une élection éclatée, par la diversité des sujets, des candidatures, des profils.

Une élection raisonnée, car le traumatisme du 21 avril 2002 privant la Nation d'un vrai second tour républicain pèsera très lourd dans le "vote utile".

Dans le poids entre ces deux critères (éclatement et raison), la situation de 2007 est presque à l'opposé de celle de 2002.

En 2002, l'élite politique était raisonnée par le fait de la cohabitation qui signifiait une part de bilan commun ou du moins partagé. En réaction, l'opinion fut éclatée et se répartit nouvellement sur le spectre du choix démocratique.

En 2007, l'élite politique est éclatée car cette élection est à la fois une fin de règne et une fin de régime mais l'opinion sera raisonnée car elle attend un vrai second tour avec une offre d'alternative républicaine.

Dans ce contexte, la marginalisation présidentielle parait progressivement incontournable. Elle ne pouvait être évitée que grâce à une forte cote de popularité.

La progression est trop faible pour parvenir à un seuil significatif.

  • Publié le 5 septembre 2006

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