Hillary Clinton et le retour à la case 2007
La présidentielle 2008 avait ses racines directes dans la campagne dite du mid term en novembre 2006.
S'il en est de même pour 2016 avec les élections intermédiaires 2014, la situation est préoccupante pour Hillary Clinton.
En 2006, l'élection marque une sévère défaite Républicaine avec le réel tournant du scandale inattendu dit «le scandale Foley», nom d’un très jeune employé du Congrès victime de jeux sexuels qui ont défrayé la chronique et ajouté à l’image de Washington, capitale des «mauvaises moeurs».
Ce tournant traduit alors deux phénomènes importants. La place prépondérante de la morale pour «l’Amérique profonde», dont le droite religieuse qui a contribué aux dernières victoires républicaines de façon décisive depuis 2000, conduit à une forte abstention qui défait des sortants Républicains dans des fiefs classiques.
La propension immédiate de cette «Amérique profonde» à stigmatiser tous les «pêchés» des Capitales de la Côte Est dont Washington, capitale politique ou New York, capitale économique et médiatique, et à souhaiter du neuf pour évoluer vers un candidat d’un profil plus modeste, au cursus moins aisé et issu de territoires intérieurs moins privilégiés.
Pendant cette élection dite du mid term, Hillary Clinton est candidate au renouvellement de son mandat de Sénatrice de New York. Elle a conscience du changement qui prend corps dans le pays et profite de cette circonstance pour tenter de changer son image de marque.
Elle sait que le pays attend une candidature chaleureuse, méritante et charismatique.
Face à cette demande, son offre est éloignée. Si Hillary Clinton est charismatique, elle n’est en revanche pas chaleureuse et son parcours personnel méritant est éclipsé par les «années Maison Blanche».
Contrairement à certains reportages parus dans des journaux «grand public» s’enthousiasmant alors sur la candidature d’Hillary Clinton à la prochaine présidentielle, il importe d’avoir à l’esprit trois repères concrets pour juger de l’état de l’opinion à son égard avant le lancement des primaires démocrates
Dans sa propre circonscription sénatoriale, elle aurait été largement battue si son opposant républicain avait été Rudolph Giuliani. Les sondages font alors classiquement état d’écarts de près de 6 points.
Deuxième donnée, seulement 33 % des électeurs de l’Etat de New York déclarent souhaiter sa candidature à l’élection présidentielle de 2008.
Enfin, à la question ouverte suivante «si vous aviez une question à poser à Hillary Clinton, ce serait laquelle?» la réponse qui arrive très largement en tête pour l’opinion publique américaine est tout simplement …: «faites vous chambre à part avec Bill Clinton ?»...
Si personne ne peut contester les qualités intellectuelles d’Hillary Clinton ni le recentrage qui a déjà été le sien dans le cadre des votes au Sénat, son parcours demeure très exposé à de nombreux scandales qui ont marqué l’opinion publique américaine même si les issues ont été souvent en sa faveur. Ces «affaires» l’ont positionnée dans un registre fait de «souffre» et d’usure qui est à l’opposé des attentes de l’opinion américaine.
Elle ne parviendra jamais à corriger son image initiale.
Elle veut conduire une campagne de proximité mais matériellement ce choix n’est pas aisé à mettre en œuvre.
En effet, lors des primaires, par son statut d’ancienne First Lady, Hillary Clinton est à la seule candidate à disposer d’une protection des services secrets Américains ; ce qui complique considérablement les choses.
Hillary Clinton entend construire ses visites comme un retour aux «connaissances d’antan». Elle rappelle en permanence qu’elle vient «revoir de vieux amis» ; même si dans le concret de l’organisation de l’agenda, l’essentiel pour elle consiste surtout à rencontrer toutes les personnalités qui comptent dans l’appareil du Parti Démocrate de l’Etat en question.
Au niveau de son discours, Hillary Clinton se veut simple, proche, à l’écoute. C’est là que les services officiels de sécurité compliquent tout et la repositionnent immédiatement du côté de son ancien statut…
A fin février 2007, les enquêtes conduites dans l’Iowa placent John Edwards en tête (24 %) suivi par Hillary Clinton et Barack Obama tous deux à égalité à 18 %.
Par conséquent, dès le début, avant même la montée en puissance incontournable de ses concurrents, rien n’était acquis pour l’ex First Lady, loin s’en faut.
Trois facteurs expliquaient cette situation.
Tout d’abord, Hillary Clinton est la candidate qui suscite le plus grand nombre de publicités négatives. Ces «negative ads» font des ravages. Elle bat les records de sites négatifs. C’est donc une candidate très exposée qui devient un favori défavorisé.
Ensuite, les électeurs attendent «un nouveau départ» c'est-à-dire un nouveau leader avec des idées nouvelles. Les anciens leaders «ont fait leur temps». Une réelle aspiration au changement de têtes se fait jour. Hillary Clinton éprouve des difficultés à trouver ce souffle du neuf.
Enfin, la mode est à la proximité, au «meeting au coin de rue». Les idéologies sont renvoyées au musée. Or, Hillary Clinton a une image durable, indécrochable d’idéologue.
En effet, son discours, toujours très conceptuel, donne le sentiment d’être idéologue.
Ce discours est perçu comme constitué d’idéalisme frustré, d’absence de naïveté ou d’émotion et surtout toujours dominé par l’ambition de la réussite. Toutes ces images pénalisent fortement la candidate démocrate. Le pays veut reléguer les idéologies traditionnelles au musée. Il attend une nouvelle génération qui soit attachée au pragmatisme, à l’équité et surtout soucieuse de «résoudre les problèmes».
C’est cette ambiance «de nouveau leadership» qui plombe dès l’origine Hillary Clinton et qui laisse des espaces pour d’autres candidats dont Barack Obama.
Hillary Clinton mobilise toute son imagination pour tenter d’incarner ce «neuf». Même lorsqu’elle parvient à énoncer des «idées neuves», elles paraissent comme de «vieilles recettes» déjà mises en avant sous la Présidence Clinton.
Hillary Clinton n’avait pas le tempérament à la mode.
Elle dégageait du radicalisme, du professionnalisme politique et de l’expérience là où le pays attendait du pragmatisme, de l’innovation et de la jeunesse.
Elle conduit alors une campagne qui devient agressive pour exposer ses concurrents à la gaffe qui valoriserait son expérience.
Toutes circonstances comparables, c'est un climat identique qui prend corps pendant les élections intermédiaires 2014 : l'attente d'un nouveau leadership par rapport aux années Obama.
Hillary Clinton est étroitement associée aux années Obama.
Les élections intermédiaires n'ont pas été le "tour de chauffe nécessaire" pour 2016. A maints égards, 2014 ressemble beaucoup à 2007 pour elle. Inquiétant.