Et si Donald Trump faisait exploser le bipartisme historique
Et si Donald Trump créait son propre parti pour 2024. C'est l'intention ferme qui lui est prêtée.
Et si le choc entre modérés et radicaux devenait impossible dans un même parti ? Tant chez les Républicains que chez les Démocrates.
Des aspects pittoresques du candidat Trump contribuent à cacher excessivement des tendances de fond qui dépassent et de loin la seule politique américaine.
La première leçon c’est que la faiblesse des partis traditionnels ne peut plus être ignorée à un moment donné. Aux Etats-Unis, l’alerte date de 2010 avec la première émergence du Tea Party. Cette alerte n’a cessé de prendre de l’importance de 2010 à 2016 du côté des Républicains. Chez les Démocrates, le vrai militantisme est ailleurs qu’au sein du … Parti Démocrate. Ce sont des associations militantes extérieures au Parti Démocrate qui font vivre le militantisme à “gauche” : MoveOn.org, Occupy Wall Street, …
Il y a un moment où la faiblesse des formations politiques classiques ne peut plus être sous-estimée parce qu’elle ouvre des contournements possibles.
C’est la seconde leçon, Donald Trump c’est fondamentalement la première OPA sur un parti politique classique. C’est une leçon majeure pour les formations extérieures à la politique. A partir de quel moment un mouvement politique classique peut-il être investi par une personnalité extérieure dotée de militants qui peut de ce fait prendre le pouvoir à l’intérieur même d’un parti ? A l’extérieur du Parti Républicain, Trump savait qu’il plafonnerait à 8 % au mieux. A l’intérieur du Parti Républicain, avec le label officiel, Trump s’assurait 38 % au pire. 30 points d’écart ! Les primaires deviennent le cadre juridique des OPA.
Pour parvenir à cette OPA, Donald Trump a changé les règles de la compétition. Il est sorti des codes du Parti Républicain. Comment ? En transformant les réunions publiques en discussions privées comme dans la salle à manger : mêmes sujets, mêmes mots, même absence de sujets tabous … Et les militants ont adhéré. Prendre une feuille de papier. Jeter 4 à 5 thèmes et parler devant 5 000 personnes comme s’ils étaient 4 connus de longue date. Voilà la disruption majeure dans les primaires 2016.
Puis, quatrième leçon, le rôle des médias. Ils doivent faire vivre l’exposition permanente puis structurer le regard de l’opinion. L’exposition permanente est le préalable. A cette fin, ils doivent disposer de la matière qui booste les audiences puisque les médias se nourrissent des audiences. Hier, Reagan avait inventé la “photo du jour”. Trump a mis en oeuvre la “polémique du jour”. Et cette logique a fait exploser les débats de fond. Par sa périodicité journalière, elle a neutralisé les analyses sur l’irréalité de certains sujets. Trop de polémiques tuaient les polémiques mais maintenaient l’exposition médiatique.
Cinquième leçon, personnaliser à fond le débat. Puisque les partis politiques sont fragilisés, le vrai repère doit être la marque qu’est le nom du candidat. Dans cette logique, il faut donc personnaliser à fond la communication de la campagne. Le parti politique devient une coquille juridique et non plus un cadre idéologique.
Enfin, sixième leçon, le rejet des politiciens professionnels. L’argument est simple. Il est double : qu’ont-ils résolu ces dernières années ? Rien alors pourquoi reconduire ceux qui sont à la source des problèmes en étant incapables de les résoudre ?
Dans des opinions qui passent de moins de moins de temps à penser à la politique, l’argument fait mouche.
Ces 6 leçons vont beaucoup compter dans les prochaines années.
Trump, c’est d’abord le nouveau visage d’une partie importante du “débat” politique dans les démocraties occidentales. A force de vouloir ignorer cette réalité, elle explosera un jour dans des conditions ressenties comme inattendues et pourtant tellement … prévisibles.