CNews : Gérard Dezempte et la ré-affirmation de la fonction des élus locaux
En refusant de pratiquer le mariage d’un ressortissant algérien qui se trouvait en situation irrégulière, interrogé sur CNEWS ce lundi, l'élu estime qu'il «n'a pas à assumer cette responsabilité». Gérard Dezempte, Maire d'une Commune du Nord Isère (Charvieu-Chavagneux), a ainsi posé ce qui pourrait être l'un des sujets d'actualité des étudiants de droit public : la définition du contenu même de la fonction des élus locaux.
Qu'a déclaré Gérard Dezempte sur CNews : «après vérification, nous nous sommes aperçus que le visa de cette personne était périmé depuis le 15 juin 2019, ça signifie que depuis plus de quatre ans, il est dans l’illégalité sur notre territoire». «Je sais que j'ai des collègues qui, dans ce type de situation, procèdent au mariage. Moi je considère que, s’il est en situation irrégulière, je ne le marierai pas, car ça fait partie de mes fonctions en tant que représentant de l'Etat».
C'est le choc entre deux normes. Ce choc met en évidence toute la complexité des normes en France. C'est aussi probablement le débat sur le contenu à terme du principe fondamental de la "libre administration des Collectivités". Dans un Etat de droit, ce principe ne signifie pas qu'une Collectivité locale pourrait s'émanciper de lois fixant un cadre pour l'ensemble du territoire. Mais comment nier qu'un élu local pourrait être dépourvu de toute marge d'interprétation lorsqu'il doit agir comme "représentant de l'Etat" dans l'application d'une règle ?
En réalité derrière le simple débat juridique qui est passionnant, c'est aussi l'ouverture depuis quelques mois par l'extrême gauche du débat sur la loi "légitime". Ce débat ouvre une sorte de "droit de retrait" pour un élu qui considère qu'il y a une confrontation entre sa morale personnelle et une règle de droit.
Au-delà du droit, c'est aussi un débat politique majeur au sein des droites républicaines françaises. Ce week-end au sein de la fête de l'Humanité, Edouard Philippe, ex directeur général de l'UMP de 2002 à 2004 aux côtés d'Alain Juppé, dit préférer voter pour le PCF plutôt que pour le RN.
De telles déclarations sont des tournants pour la droite de la V ème République.
Des Gouvernements du Général de Gaulle, de Georges Pompidou à ceux de Nicolas Sarkozy, la droite a gagné quand elle a été capable de faire cohabiter ses sensibilités pluralistes. Ce fut le cas avec Jean Foyer, Pierre Messmer, Roger Frey qui étaient au Gouvernement avec VGE, Pierre Sudreau, Fontanet, Pisani comme Charles Pasqua et Robert Pandraud pouvaient être dans le même gouvernement que ... François Bayrou.
Quand la droite refuse sa pluralité, elle se voue à la défaite. C'est tout le débat de fond actuel.