Luc Chatel face à l'enjeu Caterpillar
L'issue du conflit Caterpillar est un scandale qui ne peut que mobiliser celles et ceux qui sont attachés au respect de la ressource humaine.
La crise économique impacte fortement l'actualité quotidienne.
3 000 emplois par jour sont supprimés depuis quelques semaines. Les médias institutionnels semblent guidés par la volonté de marginaliser cette réalité. C'est dommage pour la qualité du contenu de l'information. C'est d'autant plus regrettable que certains conflits montrent des tournants dans les réactions collectives.
Dans les années 70, le conflit le plus symbolique fut celui de Lip, proclamant alors la force de l'autogestion face à un patronat paternaliste qui partageait peu ou pas du tout les décisions. José Bidegain a publié des travaux très intéressants sur cette ambiance. L'autogestion fut rangée dans les tiroirs mais la participation allait connaître de nouvelles avancées d'ailleurs largement insuffisantes.
Dans des circonstances différentes, le conflit Caterpillar donnera probablement lieu à des études intéressantes. Il a marqué deux valeurs :
- le retour en forme de la solidarité salariale,
- la priorité à l'instant présent.
Jusqu'alors, dans de très nombreux cas, des conflits étaient fragilisés par des divisions dans le front des revendications.
La crise d'octobre 2008 a fait renaître une conscience de classe c'est à dire la certitude que la revendication collective est le seul moyen d'être fort.
Cette conscience de classe nouvelle repose sur des bases différentes. La ligne de frontière est désormais entre ceux qui "profitent" de la crise et tous ceux qui "subissent" la crise, ses précarités, ses angoisses ... C'est la fin du "sauve qui peut" qui prévalait jusqu'alors.
Deuxième constat, la confiance est tellement ébranlée qu'accepter un sacrifice immédiat au motif d'en éviter un autre éventuel demain ne marche plus.
Chacun a le sentiment qu'accepter un sacrifice immédiat s'ajoutera au sacrifice prochain juste différé. C'est donc un cumul d'inconvénients intolérables. Cette perception montre que la confiance n'existe plus. Là aussi, c'est une nouvelle donne importante qui ne peut que radicaliser les relations.
Caterpillar marquera une étape dans les conflits sociaux. C'est dommage que le Gouvernement par la voix de son Ministre de l'Industrie n'ait pas opté pour un virage montrant son rejet de principe des "licenciements kleenex" quand un groupe international enregistre de tels profits.