Philippe Marini et la fin de l'addiction à la dépense
Philippe Marini, Sénateur de l'Oise, effectue aujourd'hui une présentation très réaliste de l'enjeu : mettre fin à l'addiction à la dépense qui frappe les élus et redéfinir le périmètre du secteur public.
L’actualité place sur le devant de la scène la question de la dette publique sur le plan national comme sur le plan local.
Trois documents méritent une attention importante :
1) Le communiqué de Standard & Poor’s qui montre bien ce que surveillent les agences de notation.
Il est notamment indiqué :
«L'abaissement de la note reflète notre opinion selon laquelle le plan de rééquilibrage du budget sur lequel le Congrès et l'exécutif se sont récemment mis d'accord est insuffisant par rapport à ce qui, de notre point de vue, serait nécessaire pour stabiliser la dynamique à moyen terme de la dette publique.
Plus généralement, l'abaissement de la note reflète notre point de vue selon lequel l'efficacité, la stabilité et le caractère prévisible des politiques publiques et des institutions politiques américaines se sont affaiblies à un moment de défis budgétaires et économiques persistants, à un degré supérieur à ce que nous entrevoyions lorsque nous avons attaché une perspective négative à la note, le 18 avril 2011.
Depuis, nous avons changé notre façon de voir les difficultés à établir un pont entre les partis politiques au sujet de la politique budgétaire, ce qui nous rend pessimistes sur la capacité du Congrès et du gouvernement à transformer leur accord de cette semaine en un plan de rééquilibrage plus large qui stabilise les dynamiques de la dette publique dans un avenir proche.
La perspective sur la note de long terme est négative. Nous pourrions abaisser la note à «AA» d'ici aux deux prochaines années si nous voyons qu'une réduction des dépenses moindre que convenu, une hausse des taux d'intérêt, ou de nouvelles pressions budgétaires pendant cette période entraînent un relèvement de la trajectoire de la dette publique par rapport à ce que nous supposons actuellement dans notre hypothèse de base.
(...)
La controverse durable au sujet du relèvement du plafond légal de la dette et le débat sur la politique budgétaire qui l'ont accompagnée indiquent que de nouveaux progrès à court terme pour contenir la croissance des dépenses publiques, en particulier dans la protection sociale, ou pour obtenir un accord sur une hausse des recettes, sont moins probables que nous ne le supposions auparavant et resteront un processus conflictuel et agité.
(...)
Républicains et démocrates n'ont su s'entendre que sur des économies relativement modestes sur les dépenses tout en déléguant à la Commission bipartite des décisions sur des mesures plus complètes. Il apparaît que pour le moment, de nouvelles recettes ne sont plus à l'ordre du jour des possibilités. De plus, le plan entrevoit seulement des changements mineurs concernant Medicare et peu de changements dans d'autres programmes de protection sociale, dont nous et la plupart des autres observateurs indépendants, considérons qu'il est essentiel de contenir la taille pour la viabilité du budget à long terme.
Notre opinion est que les élus restent conscients de la nécessité de répondre aux questions structurelles qui se posent pour s'attaquer efficacement au problème de la montée du poids de la dette publique des États-Unis d'une manière conforme à une note «AAA» et aux autres Etats notés «AAA»».
L’agence sanctionne d’abord les marqueurs insuffisants de changement de rythme et d’ampleur des économies.
2) Un organisme américain a effectué une présentation très pédagogique de la situation en indiquant qu’il ne fallait pas confondre le robinet et l’évier. Aux Etats-Unis, le tournant a été la publication de rapports du CBO (Congressional Budget Office), un organisme indépendant aux compétences reconnues. Que disent-ils pour l'essentiel ? Au rythme actuel, la dette fédérale américaine atteindra 190 % du PIB dans 30 ans alors qu'elle est aujourd'hui à 70 % du PIB. Ce n'est donc plus possible de continuer.
Ce bureau a développé une argumentation simple mais imparable : la dette est le montant des déficits cumulés. Il ne faut pas confondre le robinet et l'évier. Les déficits sont le robinet. Il est question que le robinet coule moins. Mais la dette, c'est l'évier et l'évier est déjà plein. Donc la question n'est pas que le robinet coule moins mais que l'évier commence à se vider ...
Or aujourd'hui, le seul débat est "hors sujet" puisqu'il ne porte que sur les conditions pour que le robinet coule moins dans un évier ... déjà plein !
Par définition, il y a impasse.
L'alternative n'est plus entre la catastrophe d'une notation et la continuation de l'Etat providence. L'alternative est entre les mesures radicales urgentes et le choc encore plus massif à court terme.
L’organisme avait averti que le compromis risquait de provoquer deux conséquences :
- il ne calmerait pas les marchés,
- bien davantage, il les inquièterait parce que les marchés ont maintenant un double sentiment : l'impuissance du pouvoir politique à s'attaquer aux questions de fond et pour autant ils voient des compressions budgétaires qui vont handicaper toute relance voire même engager un processus de récession.
3) Dans une revue étrangère, Guy Sorman (auteur de "L'économie ne ment pas" / Fayard 2008) a publié samedi un article remarquable sur les leçons de la crise. Il prend ses distances avec toutes les explications compliquées pour revenir à des socles de bon sens.
4 facteurs méritent à ses yeux une attention particulière :
- dès que l'avenir est incertain, les responsables économiques baissent la voilure par précaution. Donc la logique baissière de la Bourse s'installe,
- quand l'endettement s'approche d'une année de revenus pour les Etats, ce n'est pas insurmontable, selon les Etats, mais cela ne peut pas s'inscrire dans la durée,
- par conséquent, les Etats en question doivent rapidement attester qu'ils ont compris qu'il importait de diminuer les coûts de fonctionnement et de réviser l'un des plus gros postes des dépenses : les assurances sociales,
- pour les "vieux pays", c'est une exigence d'autant plus forte que les capitaux ont aujourd'hui la faculté de les quitter pour aller sur des marchés plus prometteurs : Chine, Inde, Corée du Sud ...
Par conséquent, la révision du périmètre des interventions des collectivités publiques est incontournable.
Philippe Marini vient de le confirmer ce jour avec le pouvoir d'expertise et la rigueur qui sont les siens.
Il est temps que le secteur public commence à vider l'évier de ses dépenses excessives ou trop éloignées de ses fonctions essentielles.