Le nouveau calendrier électoral (Edito 11)
Progressivement, un nouveau calendrier électoral se dessine.
Pour l'essentiel, il est supposé respecter les échéances suivantes :
- avril 2007 : élections présidentielles,
- mai-juin 2007 : élections législatives,
- mars 2008 : élections municipales et cantonales.
Ce calendrier introduit de nombreuses modifications.
Où faire campagne ?
Ce calendrier traduit d'abord une prééminence en faveur de l'élection présidentielle qui risque de déséquilibrer le fonctionnement institutionnel. Placer ainsi les élections législatives dans la foulée des élections présidentielles revient à une "présidentialisation" de la majorité parlementaire qui s'avèrera probablement excessive et malsaine dans la durée. Le régime présidentiel américain comporte des renouvellements partiels des deux Chambres de nature à pondérer le seul calendrier présidentiel.
Cette nouvelle donne est lourde de conséquences sur le terrain des élections législatives. Chaque candidat doit désormais examiner avec une attention particulière la question suivante : où faire campagne ?
Chaque candidat doit choisir le théatre d'opération qu'il entend occuper. Son positionnement pendant l'élection présidentielle devient désormais un réel rendez-vous de pré-campagne. Doit-il s'engager derrière un perdant probable ? Dans ce cas, sa participation ne se transformera-t-elle pas en plongeoir et non pas en tremplin?
Seconde interrogation nouvelle : la place accordée aux problèmes nationaux. Les élections législatives ont été longtemps un savant mélange de politique nationale et de politique locale. Le calendrier très raccourci entre l'élection présidentielle et le renouvellement de l'Assemblée Nationale "nationalise" le débat des législatives.
Comment se présenter ?
Cette évolution fait naître une autre catégorie de problèmes stratégiques pour le candidat aux élections législatives.
Le candidat doit doser la part qu'il accorde entre son engagement en faveur d'un candidat aux élections présidentielles et celle liée à son indépendance personnelle. Dans la mesure où l'élection législative se transforme en mandat donné au vainqueur présidentiel pour qu'il ait les moyens d'appliquer son programme présenté lors de l'élection présidentielle, la tentation sera forte pour de nombreux candidats de chercher à surfer sur cette vague. Pour bien occuper les divers créneaux possibles, cette réalité tactique ne peut être modérée que par des candidats à forte personnalité. Pour résister à la "vague présidentielle", il faut une image forte donnant le sentiment d'idées personnelles sur les grandes questions. Hors la "vague présidentielle", le salut est donc dans la force du tempérament et la notoriété du candidat.
Des municipales new look ?
Dans la multiplication considérable des échelons territoriaux et le partage de plus en plus imbriqué des compétences, les citoyens Français tendent à ne reconnaître que deux qualités électives : celle du Président de la République, symbole du pouvoir national et celle du Maire, symbole du pouvoir de proximité.
Parce que ces deux autorités politiques ont des identités fortes, ces deux élections ont un rythme propre. Pour les autres, à l'exemple caricatural des régionales de 2004, les élections constituent un indicateur de popularité du pouvoir national.
Placées à une petite année des élections Présidentielles, les municipales constitueront la première rencontre du nouveau pouvoir présidentiel avec le suffrage universel national. Elles risquent de perdre leur particularisme pour revenir à la case des élections de mars 1983 qui avaient été marquées par un profond climat de sanction contre le pouvoir socialiste.
Pour éviter une telle éventualité, il est à craindre que le nouveau pouvoir ne modère ses réformes impopulaires et perde ainsi l'effet positif de "l'état de grâce" né de l'élection présidentielle.
Dans toutes les hypothèses, ce calendrier produit des effets négatifs sérieux.
Il présidentialise excessivement le scrutin législatif et de ce fait altère la fonction parlementaire déjà très dépossédée de prérogatives dans la Constitution de 1958.
Il place un scrutin majeur (élections municipales) dans une logique de "réaction" qui est malsaine par rapport à la vocation de gestion de cet échelon.
A ces reproches majeurs s'ajoute celui d'une refonte des échéances dans des délais aussi brefs ce qui ne constitue pas un gage de bonne qualité des équilibres institutionnels.
Il est nécessaire que les élus traitent sérieusement ce calendrier électoral qui nuit dangereusement au bon équilibre des pouvoirs.