Le retour de Lionel Jospin (Edito 29)

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Bien avant la "mode médiatique" des "unes" des hebdomadaires parus au milieu de la semaine 08, notre comité de rédaction avait inscrit le sujet du "retour de Lionel Jospin" à l'ordre du jour de ses travaux. Il suffit de consulter nos programmations de sommaires pour avoir confirmation de ce point. A quoi peut donc tenir la mode soudaine de ce thème ?

Trois facteurs rendent possible le retour de Lionel Jospin.

Tout d'abord, en dehors de l'embellie de popularité de S. Royal dans les sondages, aucun leader socialiste traditionnel n'est parvenu à acquérir un vrai statut de présidentiable. Laurent Fabius n'a pas capitalisé l'après référendum sur le traité constitutionnel européen. D. Strauss Kahn peine à sortir de son statut d'économiste social démocrate pour acquérir une dimension plus généraliste. Par conséquent, Lionel Jospin bénéficie d'abord du vide dans son camp politique d'origine.

Ensuite, il est facile de constater que l'opinion amorce une éventuelle inversion dans la hiérarchie de ses préoccupations prioritaires. Les sujets sociaux commencent à parfois devancer le thème de la sécurité. C'est un enseignement majeur. Si L. Jospin est capable de mettre au vestiaire sa "naïveté" de 2002 sur le thème de la sécurité, il peut bénéficier directement des nouvelles attentes en matière de "protection sociale". Car là réside la véritable aspiration d'une partie du pays peu prête ou même pas du tout disposée à tourner la page de garanties sociales traditionnelles.

Enfin, pour apprécier la réalité de sa "concurrence" avec la seule qui le devance actuellement dans les sondages, L. Jospin en analyste chevronné de la vie politique sait particulièrement que popularité n'est pas vote et que l'intention de vote par sondage à 12 mois de la Présidentielle n'est pas nécessairement celle à six mois de ladite élection.

Bien davantage, dans les qualités reconnues aux deux compétiteurs, il assure un écart important sur la qualité principale : le "statut présidentiel".

Dans ce contexte général, deux autres éléments méritent une attention vigilante.

Depuis 1981, soit en 25 ans, le parti politique détenteur de la réalité du pouvoir exécutif a toujours été battu lors du renouvellement politique national :
- 1981-1986: parti au pouvoir: PS,
- 1986 : victoire du RPR,
- 1988: victoire du PS,
- 1993 : victoire du RPR,
- 1995 : alternance au sein de la droite avec la défaite de Balladur aux Présidentielles de 1995,
- 1998 : victoire du PS,
- 2002 : victoire du RPR.

Sur les 20 dernières années, le responsable politique associé à l'exercice du pouvoir national n'a jamais gagné l'élection posant la question de la reconduction de son pouvoir.

Si l'élection de 2007 se situe dans cette logique, elle offre donc mécaniquement une possibilité d'alternance.

Certes, l'une des incertitudes réside dans la faculté de Nicolas Sarkozy de faire vivre une alternance à l'intérieur de l'actuelle majorité à l'exemple de la situation de J. Chirac en 1995. Mais J. Chirac n'avait alors pas participé au Gouvernement et paraissait même terriblement marginalisé par celui-ci ; ce qui n'est pas le cas de Nicolas Sarkozy.
Autre facteur très important, Lionel Jospin peut par ses contacts mesurer l'ampleur de la compassion dont il bénéficie de la part de ses électeurs qui considèrent qu'il a été très injustement privé d'un second tour auquel "il avait droit" en 2002.

Ce sentiment d'élection "inachevée" est un socle important pour Lionel Jospin.

Il faut entendre les commentaires des militants socialistes dans leurs débats internes pour prendre la juste dimension de ce "traumatisme".

Ce volet purement psychologique impactera lourdement les éventuelles primaires internes au PS et encore davantage la concurrence du 1er tour à gauche.

Tous ces facteurs contribuent à ouvrir des perspectives à un acteur politique qui jusqu'à ce jour s'est toujours ré-impliqué dans le combat politique au-delà des déclarations des soirs de résultats électoraux.

  • Publié le 28 février 2006

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