La commémoration du 8 mai 1945 (Discours 75)

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Avec la seconde guerre mondiale, l'univers des hommes libres a failli chavirer. Pour nos puissants alliés de l'Est et de l'Ouest, cette Allemagne mise à merci n'est qu'une victoire ; pour nous, c'est une remontée de l'abîme.

En mai 1945, notre pays sort d'un gouffre au fond duquel le monde a pu le croire fracassé. Aux avant-postes du combat, la France a connu l'une des pires épreuves de son histoire. Elle a été torturée dans sa chair et dans son esprit. Ayant perdu son sol, elle a failli perdre son honneur. Elle a vécu de mois en mois et d'année en année dans une angoisse inexprimable.

En mai 1945, certains commencent à peine à découvrir, devant les suppliciés de Buchenwald, devant ces fantômes surgis d'entre les morts, l'anéantissement qu'eut entraîné la domination du nazisme.

Cette période triomphale est bien différente de celle qui ramenait à Paris en 1918 un Foch vainqueur à la tête des armées alliées. Elle est grave. Elle a été payée par de plus grandes souffrances. Elle est autrement pathétique.

Pas un Français n'ignore, en cette époque unique, l'immense enjeu de la partie gagnée. Pas un qui ne sente intensément ce qu'a représenté pour le pays, quand tout semblait perdu, la valeur d'âme irréductible d'un Général De Gaulle. Pas un qui n'éprouve une émotion poignante devant ces armées de nulle part où tant de vies furent sacrifiées pour que la vie valut encore d'être vécue.

Dans cette Europe en décombres où tant d'horreurs ont suscité tant d'héroïsmes, ayons une pensée fidèle pour tous ces combattants. Songeons aux otages, aux chambres de tortures, aux fusillés. Songeons aux hommes de c?ur qui, les premiers, traqués dans l'ombre, refusèrent de fléchir. Songeons aux défis lancés par Hitler, à ses ivresses, à ses triomphes, au déferlement de sa puissance, et laissons simplement retentir en nous cette petite phrase miraculeuse : "Hier à 2 heures 45, l'Allemagne à genoux, a capitulé."

Chers concitoyens, laissons simplement retentir en nous, aujourd'hui, cette petite phrase. Laissons simplement remonter en nous toutes les émotions et tous les souvenirs rappelés par ce message lancé dans la presse, le 8 mai 45, par le journaliste et critique littéraire Pierre BRISSON. Contentons-nous, à cette heure, de laisser notre mémoire remonter le temps et d'imprimer des évènements de ce dernier printemps de guerre, car les commémorations sont faites pour ce rappel et cette méditation intérieure non pour obliger chacun à des attitudes ou à des devoirs stéréotypés et obligatoires.

Alors, souvenons-nous du vent de libération qui souffla sur notre pays en 1944, du 6 juin, jour du débarquement allié en Normandie, jusqu'au 23 novembre où la ville de Strasbourg fut libérée. Souvenons-nous du formidable espoir qui grandit tout au long de l'hiver qui suivit, malgré les privations encore plus dures à supporter après cinq ans de guerre, les violences, la délation et l'attente

En nous remémorant aujourd'hui cette période sombre de notre siècle, en nous inclinant devant les tombes des parents, des amis, des inconnus qui sont tombés sous le coup de l'histoire, nous célébrons le retour de la paix. Nous célébrons le retour d'une société juste et égalitaire, libre et démocratique.

Nous en remercions ceux qui se sont battus, non pour manger à leur faim ou dormir au chaud, mais pour vivre dans la dignité et la liberté et pour que tout le monde après eux puisse en faire autant.

Ceux qui ont mené ce combat pour la vraie liberté, celle qui, une fois conquise, porte en germe et permet toutes les autres conquêtes ; ceux qui, à l'image de ... (citer le nom d'un ou plusieurs héros locaux), en leur donnant vie ou en la risquant, nous ont permis d'être ici présents, à cette heure à rendre grâce à notre pays, cette France qui ne peut être la France sans la grandeur ; cette France dont nous sommes les enfants et à laquelle nous somme attachés avant toute autre chose.

Pour elle, pour l'Europe et l'humanité entière, ne nous lassons pas de répéter et de témoigner "plus jamais la guerre".

Il est de notre devoir de ne pas l'oublier, de ne pas oublier les causes qui entraînent la guerre et les conséquences qu'elle entraîne à son tour. Cette victoire, peu à peu arrachée à l'ennemi, doit toujours animer notre dignité collective "la France qui se bat, de la seule France, de la vraie France" pour reprendre les formules du Général de Gaulle lors de la Libération de Paris.

  • Publié le 2 mai 2006

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