La campagne de Ségolène Royal (02/02) (Edito 58)

  • Segolene Royal
  • Exprimeo

Pour bien comprendre l'ampleur de l'actuelle popularité de Ségolène Royal, il importe d'avoir à l'esprit 4 questions de simple bon sens :

1) un homme ayant participé à la vie politique, muni de qualifications aussi "étroites", aurait-il une chance de figurer en tête des sondages ?

2) Cette popularité traduit-elle un changement culturel profond, majeur, durable ?

3) Comment peut-elle résister aux temps forts d'une campagne électorale dont le traditionnel débat de l'entre-deux tours ?

4) Est-ce une popularité pour la candidature ou pour la victoire ?

La première question est capitale. Aucun profil présidentiel ne résulterait actuellement pour un homme d'une expérience publique comparable à celle de Ségolène Royal. C'est une quasi-certitude. Ou alors la vie politique française connaît une véritable révolution pour accéder à la fonction présidentielle...

Jusqu'à ce jour, pour un candidat masculin, deux étapes étaient obligatoires :
- l'exercice de Ministères de premier rang,
- une responsabilité majeure dans un parti politique.

Ségolène Royal ne compte aucune de ces deux qualités.

Elle n'est pas populaire parce qu'elle ne compte aucune de ces deux qualités sinon la concurrence serait forte. Elle est populaire parce qu'elle est une femme et cette qualité la dispense d'un parcours traditionnel.

De la popularité en faveur de Ségolène Royal, il est prématuré d'en déduire qu'un changement culturel majeur durable serait engagé dans l'acceptation des femmes dans l'accès aux plus hautes responsabilités. Il suffit de constater les chiffres et les actuelles difficultés de bon nombre de candidates à l'investiture législative pour observer qu'il n'est pas encore question d'un vrai mouvement de fond malheureusement.

La troisième question est d'une certaine manière une forme de réponse à la première. Ségolène Royal est populaire parce qu'elle est une femme. Elle est jugée en tant que femme donc avec des critères nouveaux.

Il est surprenant de constater que la rentrée de septembre est intervenue avec pour repère l'attente des "gaffes" de la leader socialiste qui la feraient chuter.

Les attaques machistes du début de campagne ont pris fin. Mais il reste une approche différente avec des termes qui n'apparaissent que très rarement pour des candidats masculins : séduction, beauté, gentillesse ...

Même si la candidature de Ségolène Royal ne devait pas aller au terme, c'est une formidable avancée qu'elle a ouverte à la place des femmes dans la vie publique française.

La perception de la place des femmes en sera forcément modifiée.

Cette constatation ouvre la dernière question majeure : popularité pour la candidature ou pour la victoire ?

Pour répondre à cette question, trois facteurs sont à prendre en compte :
- les circonstances du 1er semestre 2007. Si les tensions internationales s'aggravent et l'insécurité interne devient obsédante, il est à craindre que le retour à des qualités historiques pour assumer la fonction suprême ne place Ségolène Royal en difficulté. L'opinion la considérera-t-elle assez forte pour engager des actes de 1ère gravité ?

- Les femmes vont-elles soutenir une femme candidate ? A ce jour, il n'y a aucun signe d'un soutien particulier de l'électorat féminin. Sur ce plan là, l'analyse des profils électoraux traduit même un certain échec.

- L'électorat n'entend-il pas procéder par étape ? Ouvrir la porte de la candidature mais peut-être pas encore celle de la magistrature suprême ?

Ces dernières questions sont les enjeux des tournants des prochaines semaines. Un changement culturel majeur est déjà intervenu. Jusqu'où ?

  • Publié le 26 septembre 2006

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