Santé : l'Association France Dépendance interpelle les candidats

C'est une lettre ouverte très détaillée qu'adresse le Professeur Marie Christine Gros-Favrot
en qualité de Porte-parole de l’Association France Dépendance (AFD) aux candidats à la présidentielle 2017.

Association France Dépendance


Ainsi, il est notamment question de :

" ...
Aujourd’hui, la dépendance touche presque 8% des seniors. Plus de quatre millions de nos concitoyens, dits les aidants, les accompagnent quotidiennement à domicile ou dans des structures spécialisées.

Nous sommes tous concernés car nous vivons plus longtemps et des maladies qui étaient incurables sont aujourd’hui chroniques avec des séquelles invalidantes. On estime à près de deux millions le nombre de personnes âgées dépendantes en 2040.

Dans un rapport de juillet 2016, la Cour des Comptes alertait les pouvoirs publics puis formulait des recommandations pour améliorer la prise en charge des personnes âgées dépendantes.

Des messages similaires sont portés depuis longtemps par les associations de patients et d’aidants. Les attentes de la population sont claires : 90% des français souhaitent que le maintien à domicile soit privilégié par rapport à l’hébergement collectif, un choix qui doit influencer nos politiques publiques. Ce choix est fortement contraint par la connaissance de l’offre disponible, le trop faible développement des outils numériques, le manque de coordination entre les secteurs médicaux et sociaux, la disponibilité de l’entourage et les ressources familiales.

Une meilleure connaissance de l’offre disponible et le développement du numérique, voilà le premier objectif que s’est donné l’Association France Dépendance.

Face au désarroi du malade et de sa famille, c’est à des questions simples que répondent les bénévoles de cette association : comment parler de la dépendance dans la famille et avec la personne atteinte ? Comment s’organiser ? Qui contacter ? Quels sont les relais institutionnels ? De quelle aide peut-on bénéficier ? Quel est le rôle du médecin référent dans la prise en charge du malade ?

Au-delà, les mesures à mettre en place sont institutionnelles et dépendront donc de notre prochain gouvernement.

Le manque de coordination entre les différents secteurs médicaux (ville et hôpital) et sociaux est le maillon faible de l’ensemble de notre système de santé avec notamment des conséquences lourdes pour la prise en charge de la perte d’autonomie.
La politique en faveur des personnes âgées en perte d’autonomie est conduite par l’Etat avec pas moins de 3 directions au sein du ministère de la santé et des affaires sociales, l’assurance maladie et la Caisse Nationale de Solidarité pour l’autonomie, les agences régionales de santé et les collectivités locales. La Cour des Comptes note que : « la difficulté la plus notable reste cependant moins celle de la redondance des interventions que la concurrence latente entre ces directions d’administration centrale ».

Au niveau local, la Cour des Comptes souligne la faible coordination entre les organismes de sécurité sociale et les départements pour permettre aux personnes en perte d’autonomie de bénéficier de l’Allocation Personnalisée Autonomie qui permet de couvrir une partie des frais d’aides à domicile, à la charge du dépendant ou de sa famille.

L’Association France Dépendance reçoit chaque jour les témoignages de ces personnes qui attendent deux à trois mois qu’un personnel du conseil départemental puisse venir évaluer leur degré de perte d’autonomie (dit GIR) dont dépend la première attribution de l’APA mais aussi l’ouverture à des droits plus élevés si leur état s’aggrave. La difficulté des services départementaux, humains et financiers, à effectuer cette mission ne peut que s’aggraver. Enfin, la Cour des Comptes souligne que l’essentiel de la solidarité exprimée en faveur des personnes âgées dépendantes relève en grande partie de la sphère familiale. La progression des besoins, dans un contexte où les financements publics atteignent leurs limites, tend à accroitre la charge financière pesant sur la personne ou son entourage. La Cour préconise de renforcer le soutien aux aidants et de cibler les aides financières sur les plus fragilisés et les plus démunis. A ce titre, dans un objectif d’économie des finances publiques, la Cour des comptes préconise d’exclure du bénéfice de l’APA les personnes en GIR4 !!!

Au-delà, la complexité vient aussi du fait qu’une personne en perte d’autonomie n’est pas traitée de la même façon selon son âge.

A partir de 20 ans et jusqu’à 60 ans, une personne en perte d’autonomie, quelle que soit la cause de son handicap (présent dès l’enfance ou acquis à l’âge adulte) perd le financement solidaire de l’assurance maladie pour entrer dans l’aide sociale départementale pour le financement de ses aides.

A partir de 60 ans, une personne dite âgée en perte d’autonomie relèvera d’un régime et donc de droits différents alors qu’à handicap égal, ses besoins sont très similaires à ceux d’une personne plus jeune.

A ce jour, c’est le coût de la mesure qui a freiné l’uniformisation de la prise en charge et la réticence compréhensible de certaines associations de handicapés qui craignent une diminution de la prise en charge du handicap. Personne n’a chiffré les économies de gestion qui résulteraient d’un rapprochement des différents organismes gestionnaires. C’est cependant le prix à payer pour assurer à nos seniors dépendants et à leurs proches, en particulier les plus démunis, une fin de vie décente. Il devient donc évident que nous devons mettre en place un régime de prévoyance pour ce cinquième risque.

L’Association France Dépendance fait ses propositions aux candidats à la Présidence de la République.

A court terme, une mesure simple peut être mise en place. L’évaluation du degré de dépendance de la personne, indispensable pour l’ouverture des droits, doit être confiée au médecin référent ou au gériatre en charge du patient. Ces médecins sont actuellement consultés dès le début de la pathologie et établissent tous les certificats médicaux pour les différentes prises en charge. Les services départementaux pourront ainsi concentrer leurs moyens pour effectuer à posteriori les indispensables contrôles. A moyen terme, l’Association France Dépendance appelle à une simplification majeure de l’organisation institutionnelle de la prise en charge de la perte d’autonomie et à la prise en compte de ce cinquième risque dans la politique assurantielle.

L’Association France Dépendance appelle ainsi à mettre en place une politique globale de la prévention et de l’accompagnement de la perte d’autonomie quel que soit l’âge de la personne et l’origine de son déficit autour, d’une part, de la Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie qui gère les financements affectés aux établissements et services pour personnes âgées ou handicapées, d’autre part, autour des Maisons de l’Autonomie dans chaque département, enfin, autour d’une convergence financière des aides allouées et de leur condition d’attribution. C’est une des voies pour répondre humainement et efficacement aux besoins des personnes âgées dépendantes. N’oublions pas qu’une personne âgée en perte d’autonomie maximum a besoin d’au moins 120 heures par mois d’aide à domicile. De telles mesures doivent être accompagnées, d’une part de plans de formation aux métiers de l’aide aux personnes en perte d’autonomie avec la création de statuts incitatifs pour ces personnels, d’autre part de reconversion de petits hôpitaux en établissements dédiés aux personnes en perte d’autonomie avec un nombre suffisant de personnels pour une prise en charge de qualité des personnes hébergées. Mais une telle mesure sous-entend de solvabiliser la prise en charge du handicap et de la perte d’autonomie.

L’Association France Dépendance demande aux candidats à la Présidence de la République qui, aujourd’hui, font des propositions de réforme du système assurantiel français de couverture maladie d’y inclure la prévoyance vis-à-vis du handicap et de la dépendance du sujet âgé. Il s’agit, comme pour la maladie, de définir le socle d’assurance sociale solidaire, d’organiser l’articulation avec le système assurantiel complémentaire et de rendre l’offre transparente.

... ".

Il reste à attendre les réponses des candidats.

  • Publié le 24 mars 2017

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