Lending Club et la "nouvelle Bourse"
Une des spécificités de la crise actuelle réside dans la crise de confiance quasi-généralisée qui est née d’un phénomène global de « bulles ». La « bulle » peut être définie comme le divorce entre des fondamentaux et la situation perçue d’un marché ou d’une position. L’exemple des titrisations dans le domaine de l’immobilier américain est caricatural. L’éclatement de cette « bulle » était incontournable. La seule question était d’identifier le calendrier et l’ampleur de la crise. Mais la crise était inscrite dans les faits dès l’origine.
Cette réalité désormais perçue par les citoyens a créé une méfiance généralisée qui va imposer un retour progressif ou brutal à des normes particulièrement rigoureuses garantes de nouvelles règles.
Après la crise de 2007 qui s’est généralisée et qui est appelée à durer ; le marché est à la recherche d’une nouvelle bulle. Un environnement nouveau s’installe de façon durable et un premier constat s’impose :
- dans le privé, les nouvelles conséquences de la crise ont déjà été intégrées,
- dans le public, l’effet de la crise est à retardement.
Le marché tend vers deux tendances :
- le retour aux fondamentaux, dans une logique de CASH SHIFTING
- la tentation des bulles, l’accélération considérable du temps dans une logique d’accélération des crises dénaturent le sens même de la crise, à savoir : "un accident à caractère exceptionnel ».
Mais la crise a pour caractéristique un phénomène visible, perceptible et identifiable avant même l’éclatement de la bulle : l’éloignement des fondamentaux.
La cotation de Lending Club montre l'apparition à venir de "nouvelles bulles". En réalité, c'est tout le financement participatif qui est en train de changer la donne par rapport aux fondamentaux.
En effet, le phénomène du crowdfunding est en train de porter des changements importants. C'est peut-être la naissance d'un vrai actionnariat populaire mais sur des bases totalement différentes des valeurs initiales appliquées à la Bourse.
Dans l'opinion des porteurs, la Bourse devait être le résultat assuré. D'ailleurs, cette logique était assumée par toutes les parties à la cotation. Euronext recommandait au chef d'entreprise de veiller à ce que son cours d'introduction soit un plancher de façon à pouvoir toujours communiquer sur le fait qu'un entrant du 1er jour n'ait jamais vu l'érosion de son placement.
Dans l'opinion des porteurs, la Bourse devait être la fluidité des échanges donc la mobilisation quasi-immédiate de son placement.
La Bourse s'est éloignée de tels fondamentaux. Les introductions ont été de moins en moins nombreuses donc la sécurité du 1er cours ne joue pas.
En dehors des quelques valeurs du CAC 40 qui assurent une fluidité immédiate des titres, combien de porteurs ont été scotchés incapables de rentabiliser un placement parce que le jour de l'offre il n'y avait pas assez de demande.
Donc la Bourse a déçu l'actionnariat populaire.
Mais une "nouvelle Bourse" est en train de naître : le financement participatif (crowdfunding).
Là, de façon étonnante, les attentes ont entièrement changé.
La place est à l'émotion et non plus à la raison financière dans le choix des placements.
L'attente du retour n'est pas la motivation essentielle.
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L'opinion aurait corrigé le tir en intégrant les leçons de la Bourse d'hier.
C'est la nouvelle participation civique : une sorte d'impôt positif volontaire pour l'emploi.
C'est peut-être un tournant majeur.
Un premier tournant est intervenu : un jeune talentueux désormais fait des affaires et non pas de la politique. Le moindre questionnaire dans une Ecole supérieure de Commerce est révélateur en la matière.
Mais le financement participatif c'est peut-être la démocratie économique de demain quand la démocratie politique est en crise et qu'elle donne le sentiment d'être un piège permanent.
Et si la nouvelle citoyenneté s'ouvrait sur des financements de ce type ?
Une victoire de plus du marché et, dans cette hypothèse, quelle victoire !
Lending Club, c'est peut-être un phénomène bien plus ample que la seule valorisation boursière record d'hier.
Ce capitalisme d'émotion via le financement participatif va créer des "bulles" au sens originel du mot à savoir l'éloignement des fondamentaux. Mais la règle est acceptée dès le départ.
Une nouvelle finance est bien en train de naître : la "nouvelle Bourse" ?