François Hollande ou comment vendre de l'optimisme ?
Un état semble caractériser l’ensemble de l’opinion publique française : la déprime. Les français ont perdu le sens de l’avenir. Il devrait être une chance. Il est une menace.
Pendant longtemps, l’opinion publique a raisonné en terme de bilan. Puis, devant l’immensité des questions s’ouvrant à elle, l’opinion a commencé à réfléchir en terme d’héritage. La notion d’héritage c’est ce qui est destiné à demeurer dans le temps. Si le bilan est modeste, l’héritage fait peur. Il n’y a pas un domaine qui ne fasse l’objet de questions majeures. Les générations passées ont imprégné celles qui les ont suivies. L’actuelle génération paraît incapable de préserver l’héritage qu’elle a reçu et incapable de déterminer précisément l’héritage qu’elle laissera.
Une génération de l’éphémère, de la rareté avec un apport encore à décanter.
Une génération de l’éphémère qui donne la priorité à l’urgence permanente : rapidité du retour sur investissement pour l’entrepreneur, rapidité du retour sur popularité pour les responsables politiques. Tout le monde semble évoluer dans l’instant. Cette culture est revendiquée au point que l’érosion accélérée des individus, des idées, des modes, des goûts et même des conditions de vie est désormais l’univers quotidien de chacun.
Une génération de la rareté qui donne en permanence le sentiment d’hypothéquer l’avenir par des comportements quasi suicidaires ou pour le moins gravement préjudiciables à l’ensemble du genre humain. Chacun dénonce les effets du pilotage à vue mais personne ne donne pour autant l’impression de prendre un « autre chemin ».
Il n’y a plus de système de pensée, explicatif du monde, débouchant sur une philosophie de l’action politique. Qu’est ce qui peut fonder aujourd’hui un vote ? Etre de gauche ou de droite, c’est quoi ?
Le désir de changement ferait-il encore la différence entre le progressisme de gauche et le conservatisme de droite ? Ce n’est plus le cas. Dans de très nombreux domaines, la « défense des acquis » est un combat revendiqué par la gauche.
Comment comprendre une opinion publique tellement éclatée qu’à un individuellement moins fragile, moins précaire, mois vulnérable dans son univers mais la nature risque de mourir et ainsi de condamner l’homme à sa perte encore plus irrémédiablement.
Cette évolution est amplifiée en effet par le fait que la menace de précarité parait désormais universelle.
Hier, les menaces provenaient de sources exterminatrices très identifiées :
- le loup ou des ogres dans des temps lointains,
- des moments précis d’insécurité (les guerres),
- des lieux précis de souffrance (les hôpitaux),
…
Pour combattre cette peur, il suffisait alors de combattre ces « symboles » bien identifiés. Dés que la précarité est généralisée, on ne voit plus les moyens de bâtir un comportement sur la raison et à partir de quelles convictions pratiques.
Parce que ce mouvement généralisé de conscience de faiblesse face à la précarité connaît une progression accélérée, une réelle peur prend naissance. Or la peur paralyse. Elle diminue la capacité d’action. Elle conduit à s’arc-bouter sur des repères sécurisants.
Hier, toutes les théories concluaient à la conclusion d’équilibres.
Aujourd’hui, toutes aboutissent à la reconnaissance de déséquilibres. Ce terme implique l’instabilité, l’insécurité, la modification des situations actuelles, des douleurs futures… Venant de tous côtés, ces menaces de déséquilibres ont fait imposer le seuil de tolérance.
L’idée de précarité est consubstantielle à la nature humaine. Mais le progrès de civilisation semblait permettre de mieux encadrer cette précarité. Ces cadres ont sauté. C’est le moment pour notre pays de montrer son vrai visage et sa capacité collective à chasser des réflexes de crainte qui alimentent de redoutables spirales.
C'est dans ce contexte très particulier que François Hollande effectue une remise en cause de la communication : vendre de l'optimisme. Valoriser ce qui va.
C'est un choix politiquement nécessaire parce que cette bataille culturelle de l'optimisme est le meilleur moyen pour changer le regard sur le bilan de François Hollande. Comment le Président pourrait-il être "mauvais" si le bilan collectif est bon ?
C'est une bataille culturelle loin d'être gagnée mais c'est la première fois qu'elle est livrée avec une méthode aussi organisée. Intéressant à suivre.