Nicolas Sarkozy, Alain Juppé, Bruno le Maire et l'idée de Nation
Qui va réagir en France face aux déclarations ce jour de Jean Claude Junker ?
L’idée de Nation ne s’est vraiment développée qu’au fur et à mesure du déclin de la féodalité. La décadence des Monarchies puis l’influence des concepts de la Révolution française et enfin l’éveil des aspirations démocratiques ont constitué les ultimes étapes de l’émergence de l’idée de Nation.
La Constitution de 1791 a été un temps fort de cette évolution par exemple en affirmant que «la souveraineté est une et indivisible. Elle appartient à la Nation ; aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice».
Progressivement cette idée de Nation a vécu trois âges.
Le premier âge fut celui de la prise de conscience d’une appartenance commune.
Le deuxième âge s’est caractérisé par la volonté d’expansion de Nations déjà constituées. La Nation se prétend alors investie d’une mission historique. Il lui incombe pas seulement de réunir en son sein les nationaux mais aussi d’apporter aux autres peuples les bienfaits du «génie national». Cette étape sera la base de l’impérialisme. Le discours impérialiste reposait expressément sur l’idée des bienfaits d’une Nation qui doit apporter ses valeurs à d’autres. L’impérialisme britannique, russe ou français se sont bâtis sur ce concept. Nous avons même pu assister à la notion d’une « nation élue » qui animait les armées allemandes ou japonaises. L’idée de Nation cédait alors la place à un nationalisme qui apporta au monde «moderne» des passions analogues aux passions religieuses d’antan.
Le troisième âge, à la lumière des excès de ce nationalisme agressif, donna naissance à la tolérance et au dépassement des passions nationales. En réalité, le sentiment national se manifeste désormais sous d’autres aspects. Si bien que ce troisième âge est parfois considéré à tort comme l’affaiblissement de l’idée de Nation. La politique industrielle, économique, culturelle, sportive voire même sociale demeurent des champs d’expression du fait national.
Des solidarités planétaires ont été reconnues mais elles demeurent fragiles et rapidement déstabilisées par des périodes de crises qui marquent alors un véritable retour en force des «réalités nationales».
En réalité, un 4ème âge a pris naissance. Il est marqué par 3 composantes.
Tout d’abord, l’affirmation du principe d’égalité entre les Nations. Dans les institutions internationales, les votes interviennent sur des bases identiques ( un Etat = une voix) et la collégialité des instances est la reconnaissance de ce nouveau principe. Avec la crise grecque, c'est un principe qui est perçu comme abandonné.
Ensuite, le second principe majeur est celui de l’indépendance des Nations. Tout Etat demeure libre d’adhérer ou pas à une organisation internationale. Bien davantage, à l’origine, l’exigence d’unanimité était la consécration de l’indépendance de chaque Etat. Là encore, cette liberté semble disparaître.
Enfin, la faiblesse des pouvoirs des institutions internationales ne fonctionnant que sur la base de pouvoirs limités et dans le cadre d’attributions expressément déléguées, voire même du caractère facultatif des décisions, a permis l’affirmation progressive desdites institutions internationales au point de devenir maintenant des sources de "souveraineté" concurrentes des Nations et ouvertement à l'exemple des déclarations ce jour de Jean-Claude Junker.
Le phénomène même de Nation est directement en cause par les conditions de déroulement de la crise grecque.
Quel leader de droite ayant une partie de doctrine dans le "socle gaulliste" va s'élever pour rappeler des valeurs fondamentales ? Nicolas Sarkozy, Alain Juppé ou Bruno le Maire ? Faute d'expression claire, c'est un espace nouveau considérablement ouvert en faveur du Front National.