Haroun Tazieff : 21 ans déjà !
2 février 1998, date du décès d'Haroun Tazieff. L'un des premiers scientifiques français à avoir annoncé de façon aussi détaillée le mécanisme du dérèglement climatique via le réchauffement de la planète.
Haroun Tazieff, c'est d'abord un tempérament hors du commun. Il est l'un des premiers scientifiques de ce niveau à avoir compris la fonction pédagogique de ses travaux. Ensuite, il a connu des engagements civiques forts. Il a été élu Conseiller Général de l'Isère et Adjoint au Maire de Grenoble, Alain Carignon. Des campagnes électorales vécues avec le panache qui a toujours été le sien. Ceux qui l'ont connu racontent des anecdotes fortes. "Quand on s'appelle Haroun Tazieff, on dort à même le sol" : ce matin de septembre 1988, Véronique Bouffard, remarquable directrice de communication accompagne Alain Carignon et Haroun Tazieff derrière la gare de Grenoble pour présenter le local de permanence d'Haroun Tazieff. Beaucoup de journalistes sont présents y compris des journalistes nationaux. Lors de la présentation du local, une erreur involontaire de formulation se produit. Elle parle de "domicile" et non pas de "permanence". Jean Louis Saux, journaliste très vigilant, laisse effectuer toute la visite.
A la fin de la visite, il s'approche d'Haroun Tazieff et lui dit non sans logique : "c'est étonnant, je n'ai pas vu de lit". Haroun Tazieff lui répond immédiatement avec un aplomb fantastique : "quand on s'appelle Haroun Tazieff, on dort à même le sol !". Tout le tempérament d'Haroun Tazieff est résumé par cet anecdote : rien n'est impossible.
Les candidats qu'il venait aider lors des cantonales voyaient immédiatement des salles bondées avec des personnes dehors car les salles étaient bondées : ce n'était pas une réunion politique mais un conte à l'occasion duquel il transportait les présents sur tous les continents.
Venu en Isère pour amitié pour Alain Carignon, les Isérois lui doivent deux projets qui malheureusement n'ont pas vu le jour pour cause de timidité après 1995 : le programme le plus cohérent et visionnaire de contournements de l'agglomération par des tunnels et le plan pluri-annuel de protection contre les risques naturels majeurs.
Avec lui tout était fête et inattendu. En janvier 1990, il vient participer aux voeux à la Préfecture de l'Isère. La file d'attente est considérable. Des rumeurs sur une "fatigue passagère" sont exprimées. Il prend son élan, court et fait une glissade de plus de 10 mètres sur le parquet de la préfecture et dit à ceux qui mettaient en doute sa performance physique "et maintenant faites en autant !".
Enfin, Haroun Tazieff incarne en politique une couleur vive d'engagements forts. C'est ce qui manque si souvent désormais en politique. D'ailleurs les politiques qui ont suivi ses "années de présence en Isère" l'ont terriblement boudé depuis. Le Département comme la Ville de Grenoble n'ont jamais organisé une seule exposition en sa mémoire. En 2015, l'un de ses ex-collègues au Conseil général de l'Isère, Denis Bonzy, a saisi le Département de l'Isère de cette demande, mettant les "nouveaux élus" en relation avec un collectionneur remarquable des "années Tazieff".
Mais en vain. Jamais la moindre manifestation en l'honneur d'Haroun Tazieff. Un "oubli" qui choque beaucoup ceux qui sont attachés au respect de la mémoire. C'est probablement une génération qui n'aime pas activer les comparaisons et qui vit au rythme désormais si impactant de l'éphémère ...