Karl Rove s'invite dans la présidentielle 2008
L'ex-Conseiller de GW Bush multiplie les conseils pour changer la donne. C'est la préfiguration d'un durcissement sévère.
Une légende entoure Karl Rove. Le ex-Conseiller le plus proche du Président Bush est au centre d'une réputation sulfureuse mais établissant aussi une incontestable efficacité.
La réputation sulfureuse résulte d'une succession de " coups tordus " prêtés à l'intéressé. Le premier d'entre eux aurait débuté à l'âge de 20 ans quand, dans l'Illinois, Karl Rove se présente comme un supporter d'un candidat démocrate, lui dérobe du papier à en tête et transforme chacune de ses réunions publiques en annonces de fêtes avec " filles et bière gratuite " distribuées aux marginaux et aux clochards.
Né en 1950 au Colorado, il est l'indiscutable maître d'oeuvre des deux dernières campagnes présidentielles de GW Bush.
En réalité, Karl Rove a introduit comme règles majeures quatre concepts.
Le premier est celui dit du " push polling ". Il s'agit de poser des questions biaisées lors d'un sondage pour modifier les intentions de votes des électeurs. Le sondage ne porte pas seulement comme message le chiffre qui donne la photographie de l'électorat sur une question donnée mais c'est l'existence même du contenu de la question qui devient le message.
Ainsi, en 1994, il commande un sondage qui, parmi les questions, comporte la question suivante " voteriez-vous toujours pour Ann Richards pour le poste de Gouverneur du Texas en sachant que son équipe est entièrement composée de lesbiennes ? ". Il transforme le sondage d'outil quasi-scientifique en instrument d'un message au " hasard " d'une question.
Il a reproduit méthodiquement ce système lors de la présidentielle de 2000 à l'occasion de la primaire difficile contre McCain en demandant si " les électeurs voteraient pour McCain si celui-ci s'était rendu coupable de trahison durant sa guerre du Viet-Nam ".
Il reproduira le même dispositif lors de la campagne de 2004 contre Kerry au moment où celui-ci caracole en tête des sondages.
Le second repère majeur dans la technique de Karl Rove, c'est la conviction que le vote à organiser est le " vote contre " et non pas le " vote pour ". C'est cette logique qui place désormais les campagnes négatives républicaines en outils les plus élaborés et efficaces des campagnes électorales.
Le troisième repère c'est de s'attaquer d'abord aux qualités majeures de ses concurrents sans respecter aucune précaution sur la vérité desdites attaques. Dés l'instant qu'un concurrent est doté d'un point fort, celui-ci fait l'objet d'un matraquage systématique pour au moins jeter le doute sur cette qualité " objective ".
Ainsi, l'été 2004, bien que titulaire des décorations militaires les plus prestigieuses attribuées après des enquêtes minutieuses, John Kerry fait l'objet d'une campagne mettant en cause la réalité de son engagement pendant la guerre du Viet-Nam. Rove aurait monté de toutes pièces à l'aide de militants républicains rémunérés des déclarations fabriquées visant à attaquer Kerry sur sa qualité principale : son engagement pendant la guerre du Viet-Nam.
Il s'en est suivi un matraquage de communication notamment par des campagnes web qui ont conduit à jeter le doute pendant un moment et conduire Kerry à mobiliser toute son énergie pour se justifier sur un point inconcevable en début de campagne. Il ne tournera la page que lorsque la chute de Kerry dans les sondages avait été amorcée.
Le quatrième repère majeur de Karl Rove réside dans le dynamisme des dernières semaines de campagne électorale. Il est persuadé que les électeurs ont la " mémoire courte " et qu'ils peuvent changer d'avis jusqu'au dernier moment. Les dernières semaines sont donc un vrai " feu d'artifice ".
Avec de tels repères, Rove a fait naître une nouvelle génération de communicants politiques.
Il se voit désormais en "sauveur" de la campagne de McCain.