Nicolas Sarkozy et les limites de la "communication armageddon"

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Depuis la présidence de l'Union Européenne, Nicolas Sarkozy met en oeuvre une reconquête intérieure par la dramatisation des enjeux internationaux. A chaque trimestre, la planète doit désormais être sauvée.

Sur le plan étymologique, le terme "armageddon" est employé pour qualifier une catastrophe planétaire, l'apocalypse.

C'est la technique mise en oeuvre depuis l'été 2008 pour réhabiliter la politique présidentielle française.

La Georgie fut le premier épisode. L'ex-bloc de l'Est était alors supposé sombrer dans la guerre. Puis ce fut la catastrophe bancaire où les épargnants étaient supposés perdre le fruit d'une vie de labeur. Puis ce fut l'Iran au printemps 2009 avec la perspective de la troisième guerre mondiale pour mettre un terme au nucléaire iranien. Puis, ce fut la grippe H1N1. Puis ce fut Copenhague et le sauvetage de la planète face au réchauffement climatique. Et demain ...?

Cette logique trouve progressivement ses limites ne serait-ce que par la répétition des catastrophes éventuelles.

La limite nait surtout du fait que pour l'opinion la catastrophe n'est plus pour demain et ailleurs mais elle intervient ici et tout de suite.

Ce décrochage fait apparaître tout le reste comme manipulation.

En réalité, ce système de communication est victime de trois facteurs.

1) La diminution de l'indépendance d'esprit. La soif de grandeur notamment matérielle a emporté l'autonomie d'analyse pour laisser place à une logique de répétition.

Les professionnels du commentaire sont de moins en moins nombreux. Ils occupent tous les fronts : hebdomadaires, radios, TV.

L'essentiel du commentaire tourne actuellement sur moins de 20 noms pour un pays tous médias confondus. Ils s'auto-confinent à un jeu de rôles au contenu bien ajusté.

Second phénomène, la place croissante admise pour l'irréflexion. Tout n'est que répétition et parfois dans des conditions d'une pauvreté affligeante tant la préoccupation n'est pas de délivrer un message mais de relayer la parole officielle.

Quelques exemples récents :
" le grand emprunt vise à effectuer des investissements pour l'avenir et ce volet d'avenir le justifie donc ". A-t-on déjà vu un emprunt lancé pour financer des investissements du passé ?
" on est sorti de la crise mais la reprise est laborieuse ". Qu'est une reprise si elle ne se différencie pas significativement de la crise ?
…

La quasi-totalité du discours Gouvernemental repose sur des affirmations vides que le moindre "innocent indépendant" dénoncerait avec facilité.

Le troisième phénomène est celui la généralisation de la vie d'illusion.
La politique est vécue comme un festin de mots relevé d'un doigt de formules. Mais la réalité est absente de ce festin.

La réalité est celle d'un pays qui ne bouge pas, qui ne se réforme pas, qui ne progresse pas. Les chutes de la première neige bloquent les routes nationales dans les mêmes conditions chaque année. Les priorités se succèdent à un rythme effréné comme si la suivante était supposée remplacer la précédente non réglée dans les faits.

Le décrochage est intervenu entre l'opinion et les acteurs de ce système de communication. Le danger naîtra lorsque la colère succédera à la déception.

L'interrogation porte désormais sur le calendrier.

C'est peut-être là le véritable "phénomène armageddon" ?

  • Publié le 21 décembre 2009

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