Dominique de Villepin et la nouvelle démocratie d'opinion
Dominique de Villepin pour dépasser le statut d'opposant-martyr de l'actuelle toute puissance présidentielle doit refonder l'ensemble de son discours pour établir un nouveau rapport avec les exigences de l'actuelle démocratie d'opinion.
Une nouvelle démocratie d'opinion est née.
Derrière cette formule se cache d'abord la mise en avant de l'individu, la place du moi au lieu du nous.
Hier fondée sur les idées, la politique est maintenant basée sur les individus. D'une communication de masse, nous sommes passés à une communication individuelle.
Comme l'encyclopédie Wikipedia, encyclopédie participative, remplace l'encyclopédie Universalis, la démocratie de chacun remplace la démocratie classique d'hier.
La place du citoyen a changé. Il cherche à résoudre avant tout ses problèmes, ses attentes personnelles et quotidiennes avant de s'interroger sur les problèmes collectifs.
La question environnementale en est l'exemple ou la victime. Comment expliquer à celui qui n'arrive pas à boucler ses fins de mois qu'il doit veiller à prendre soin de l'environnement pour préserver les prochaines décennies ?
Cet exemple montre l'immense différence entre le citoyen et l'individu.
Le citoyen est l'individu sans son égoïsme ayant conscience de la distinction entre l'intérêt général et celui particulier.
Certains diront que cela revient au même, l'intérêt général étant la somme des intérêts particuliers. Cependant, les grandes réformes demandent du temps et l'intérêt général n'est pas forcément la somme des intérêts particuliers présents.
Les grandes réformes ne peuvent trouver leur place dans la "démocratie minute" qu'est devenue notre démocratie d'opinion.
Dans l'actuelle démocratie d'opinion, les élus ne doivent pas rendre compte tous les 5 ou 6 ans devant le peuple, mais tous les jours.
Dans la démocratie d'opinion, les sondages remplacent les scrutins.
Est-ce un mal ? Pas forcément dès lors que l'on a conscience des limites de ce système.
La démocratie d'opinion permet l'action, la réactivité de nos représentants mais plus difficilement la réflexion.
Dans la démocratie d'opinion, il n'y a plus de bilan, il n'y a que des projets.
La démocratie du XXI ème siècle n'a plus les ouvrages comme repères mais la télé comme "livre de chevet".
Elle n'a plus l'histoire comme référence mais Internet comme bassin de vie. Dès lors, elle zappe, innove, va vite.
Ce nouveau cadre est un défi pour de nombreux responsables publics. Dominique de Villepin est l'un d'entre eux. L'examen de son discours montre combien il reste attaché à des valeurs générales sublimant le citoyen et l'intérêt général.
Aura-t-il la volonté et la capacité de corriger cette approche conceptuelle ?
Les individus aspireront-ils à retrouver leur statut de "citoyens" avec toutes les exigences qui en découlent ?
Ce sont là des inconnues qui conditionneront probablement les prochains seuils de progression de l'ancien Premier Ministre.