Ségolène Royal et le réalisme des programmes
DSK occupe aujourd'hui un rôle incontesté : être le marqueur du réalisme du programme PS. Une fonction longtemps occupée par Ségolène Royal qui semble aujourd'hui engagée dans la course à la gauche.
A quoi tient la popularité de DSK ? L'éloignement ? La fonction de garant de réalisme du programme de gauche ? Probablement un peu des deux. le premier volet idéalise quand le second rassure.
L'opinion publique a beaucoup évolué. Elle ne lit plus l'avenir dans les programmes mais dans les tempéraments des candidats. Le statut du programme est donc totalement modifié.
Trois évolutions majeures ont marqué l'opinion publique ces dernières années.
Tout d'abord, l'émergence d'un besoin de pragmatisme. Il aura fallu deux décennies pour que les Français acceptent de voir la France telle qu'elle est, en crise, avec ses faiblesses et ses atouts, ses difficultés et ses richesses.
Dans un premier temps, ce pragmatisme s'est traduit en négatif par le refus des idéologies de toute nature et de tout bord. Les partis politiques et, d'une manière générale les institutions, ont fait les frais de cette désaffectation.
Deuxième évolution, la disparition des "nouveaux gourous". L'opinion publique n'a plus de directeurs de consciences, véritables maîtres à penser susceptibles d'incarner les valeurs fortes de la société à un moment donné. Chacun se fait son idée et assume cette "solitude de choix" devenue une forme de reconnaissance de maturité et de liberté.
Troisième évolution de fond, l'émergence d'une "France modérée". Une France qui n'escompte pas de miracle mais souhaite une gestion efficace, qui se défie du socialisme mais n'entend pas renoncer à sa protection sociale, qui espère toujours mais ne rêve plus.
Une France qui a besoin de confiance, de courage et de coeur. C'est le défi des "3C".
La confiance, c'est un sentiment d'assurance et d'espérance au profit d'un candidat et de son équipe. Dans ce secteur, l'emploi sera de pierre angulaire de tout déclic de confiance.
Le courage, c'est la capacité à faire prévaloir l'intérêt national sur les calculs politiques, sur les engagements partisans, sur les recettes démagogiques.
Le coeur, c'est notamment l'assurance que si la crise est bien là, et qu'elle peut frapper chacun à chaque instant, par contre, il existe un filet social qui peut amortir la chute.
Ces trois défis ne sont pas principalement du ressort du discours.
Ils dépendent très directement du perçu, du ressenti ; bref, de l'irrationnel.
En conséquence, plus que jamais, c'est affaire de style, de tempérament, de façon d'être des hommes politiques en présence.
Un ancien Président de la République insistait en indiquant : "le style n'est pas une apparence. C'est l'apparition en surface de la nature profonde des êtes et des choses".
Chacun se fait plus facilement une idée sur le tempérament d'un individu que sur la faisabilité d'une mesure perdue dans la liste d'un programme de priorités.
Sur ce tempérament, Ségolène Royal semble abandonner sa valeur ajoutée initiale pour entrer dans une course à la gauche qui a d'autant plus de quoi inquiéter que la "gauche dure" n'est pas avare de déclarations éloignées des contraintes de la gouvernance.
En temps de crise, dans les dernières semaines d'une présidentielle, l'irréalisme d'un programme n'est-il pas un luxe que l'opinion sait ne plus pouvoir se permettre ?