François Hollande et le besoin de légendes
Le parallèle entre la présidentielle française et la primaire républicaine est étonnant en ce moment. Dans les deux cas, l'opinion observe, tarde à se mobiliser car elle est en manque de légendes. Une présidentielle peut-elle vivre sans légende, sans ce leadership qui fait la "race des chefs" perçue par l'opinion ?
Aux Etats-Unis, chaque parti compte plus de 20 présidentiables désireux de prendre la tête du "gendarme du monde".
En France, quand un candidat présidentiable s'annonce, il le fait presque en accompagnant sa déclaration d'un mot d'excuses.
A quoi tient cette différence ?
La vie politique Française manque-t-elle de leaders dotés de la mégalomanie indispensable ?
Vouloir gouverner un pays, c'est donner 10 ans de son existence à cette "oeuvre". C'est considérer que la pays en question ne peut pas se passer de l'apport du candidat.
Le candidat doit vivre pour cet objectif et oublier le reste.
Le candidat n'existe plus en tant que tel mais comme point de passage de cette ambition pour le collectif. Il doit être sûr qu'il est seul à porter ce qu'il juge indispensable.
Lors des campagnes Américaines, l'approche des leaders présidentiables dégage cette volonté irrésistible de conquête. Ne pas l'avoir ne serait pas du recul ou de la modestie mais du mépris pour l'objectif à atteindre.
En France, il en est autrement.
Certes le cadre légal est différent. Les possibilités financières sont réductrices. Mais ce débat de moyens ne doit pas cacher un autre enjeu : le mental des compétiteurs.
Ce mental n'est pas celui de Narcisse. C'est celui du gagnant potentiel.
Manifestement, Nicolas Sarkozy a ce mental. La nouvelle génération du PS vivra-t-elle aussi cette mutation et si oui qui la portera ?
Nous connaissons tous des responsables politiques brillants, intelligents, doués. Ils ne sont pas forcément modestes. Mais ils n'ont pas cette mégalomanie positive qui est le socle d'une telle conquête.
Ce "mystère" sera l'un des rendez-vous des prochaines semaines. Combien de "présidentiables" franchiront d'abord cet obstacle qui ne dépend que d'eux ? Le jour où cet obstacle sera franchi, la vie politique Française gagnera en émulation véritable donc en qualité.
En réalité, cette situation naît dans deux données actuelles majeures.
La première est la pesanteur du "politiquement correct". La seule vertu actuelle réside dans la soumission au politiquement correct qui installe un cadre réducteur des marges de libertés.
Parce que, second facteur, cette campagne s'annonce sous le règne du possible.
Le leadership relève d'une autre dimension.
Les grandes avancées économiques, culturelles ââ¬Â¦ n'auraient jamais été possibles sans cette force qui permet de dépasser les contingences habituelles.
Ce sont des moments où justement l'individu se connaît bien et ressent qu'il peut porter un projet qui dépasse le commun.
Il y a alors une qualité importante qui est d'une part cette connaissance de soi et d'autre part cette volonté de dépasser la peur de l'habitude.
François Hollande a choisi le cap de la "normalité" comme si l'exceptionnel pour la fonction présidentielle pouvait résider dans le fait d'être "normal" pour ne pas dire ordinaire.
C'est un choix original. Mais l'opinion peut-elle se prendre de passion pour une "situation normale". C'est tout le pari de la démarche de ce leader socialiste dont l'issue en dira long sur la mentalité actuelle de l'opinion française.