François Hollande et la crise de sa communication

  • Francois Hollande

La période actuelle semble être celle de la multiplication accélérée des crises. La notion de crise est familière à la nature humaine. Tout notre fonctionnement collectif vise à prévenir les crises, à les circonscrire, à les maîtriser, à les surmonter.

Ce sont des périodes où l’ordinaire cède le pas à l’exceptionnel. Depuis quelques décennies, le cycle des crises semble s’être considérablement raccourci.

Dans tous les domaines, il y a en effet une situation désormais quasi-permanente de crises.
Pour ne citer que les dernières et les plus importantes :
- En matière d’environnement :
o 2010 : British Petroleum et l’accident du forage dans le golfe du Mexique,
o 2010 : l’échec de Copenhague et le sentiment que la Communauté internationale est incapable de s’attaquer aux racines du réchauffement climatique,
o …

- En matière d’économie :
o 2010 : crise des dettes dites souveraines,
o 2009 : crise des établissements bancaires,
o Depuis 2008 : crises ponctuelles de licenciements dits « boursiers » c'est-à-dire de groupes avec des résultats bénéficiaires mais qui procèdent à des licenciements de personnels. Cette notion a été très vulgarisée en France en septembre 1999 quand le groupe Michelin a cassé son image «paternaliste et protectrice » en procédant à une vague de licenciements.
o 2010 : à côté de crises mettant en cause des segments de marchés figure des crises ponctuelles à l’exemple de la toute récente sur les fichiers d’Acadomia.
Cette liste pourrait s’allonger à des domaines de santé (depuis la grippe A jusqu’aux défaillances d’établissements hospitaliers). Elle pourrait aussi concerner l’impact des grèves récurrentes de certains organismes comme Air France, la RATP ou la SNCF.

Toutes ces crises ont en commun une conséquence directe : le mauvais traitement d’un accident donne naissance au sentiment de trahison de la marque.

Par le mot marque, il s’agit de viser la structure (société, collectivité, organisme para-public …) qui est mise en cause comme ayant failli à ses devoirs.

Ce premier constat met en évidence la chaîne de la crise : un accident par son ampleur ou par sa mauvaise gestion change de catégorie pour «mériter» la qualification de crise.

Dans le feu de la gestion de la crise, l’enjeu c’est qu’une crise de communication ne s’ajoute à la communication de la crise et n’amplifie pas alors la perception de la défaillance.

C’est cette chaîne qu’il importe de casser pour que l’accident ne change pas de dimension et que la réactivité face à l’accident permette de consolider la confiance dans la marque.

Cette chaîne ne doit pas pour autant laisser déduire que toute crise entraîne une crise de la marque. Parfois même la crise renforce une marque qui a su réagir dans des conditions efficaces.

Cette efficacité montre à l’expérience que la qualité de la réponse à la crise dépend surtout de la qualité de la préparation à répondre à une éventuelle crise.

C'est la situation actuelle rencontrée par François Hollande : sa communication sur la crise a mis en crise sa communication.

Les études sur l'impact réel des crises sur le consommateur n'en sont encore qu'à leurs balbutiements du fait de leur complexité.

En effet, les crises touchent la relation qu'entretient le consommateur avec la marque et donc des composantes affectives.

La nature de la crise a un grand rôle dans l'impact sur le consommateur.

Si elle concerne la santé, si elle est un drame social ou si elle suscite la réprobation morale, elle aura un impact accru.

En cas de crise sur les valeurs morales, l'intensité émotionnelle est plus forte et les réactions peuvent donc être virulentes. Paradoxalement, une forte relation affective peut limiter l'impact de la crise (le consommateur "n'y croit pas": minimisation) ou si la charge affective est trop grande, provoquer un désengagement.
Si le problème est ponctuel et vite résolu et qu'il concerne les produits, l'impact sur le consommateur est faible. Le citoyen consommateur excuse en effet assez facilement un exceptionnel problème de qualité.

Donc l'impact de la crise dépend de la sensibilité du consommateur (situation familiale, personnalité) et des habitudes qu'il entretient avec la marque.

Quand le contexte est déjà signalé, les consommateurs sont encore plus attentifs aux événements et c'est le cas des crises alimentaires qui sont récurrentes depuis quelques années et celui de la vache folle qui est née en 1996.

Il importe également d’avoir à l’esprit que les effets d'une crise sur l'attitude du consommateur évoluent dans le temps. A court terme, un changement d'image de l'entreprise intervient avec une perte de confiance (surtout quand la crise est une crise de valeurs morales ou sociétales).
Les études ont montré que les consommateurs les plus fidèles sont plus sensibles à la réaction de l'entreprise (en qui ils ont eu l'habitude de faire confiance) face à la crise : au niveau de sa réponse, du type de réponse apporté, des mesures prises, de la rapidité de son action, de la "bonne volonté" investie dans la résolution du problème.

Si la réponse est rapide, clairement assurée, que les actions effectuées montrent l'engagement de l'entreprise, c'est bien mieux perçu, en général "tout s'arrange".

En matière politique, les études sont encore plus rares.

La rupture de la relation de confiance semble encore plus logique qu'en matière économique.

François Hollande est victime d'un double calendrier :
- le timing de la primaire PS dans le calendrier global de la présidentielle,
- l'accélération de la diffusion de la crise financière.

Rapportée aux études en matière d'économie, François Hollande pourrait payer un prix très cher pour ses actuels flottements si l'opinion devait en tirer pour leçon une incapacité à bien gérer les crises.

  • Publié le 11 novembre 2011

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