Dominique de Villepin face au choc François Bayrou
Au départ, Dominique de Villepin et François Bayrou étaient supposés se neutraliser l'un et l'autre en se partageant le créneau du centre droit.
Ce pari qui inspirait les commentaires pendant l'été 2011 semble dépassé actuellement tant la mode François Bayrou prends corps.
A quoi tient cette mode ?
Bayrou incarne le leader de proximité auquel il est facile de s’identifier. C’est le leader sympa, tolérant, d’accès facile, humain. Il rassure.
Il a pris des coups, connu des épreuves, vécu des traversées du désert ... : bref, quand il parle des crises, c'est un domaine qu'il connaît personnellement.
Enfin, dernier facteur, l’opinion est traversée par un terrible besoin d’harmonie. Elle attend des «collectivités couettes» qui protègent en ces temps si difficiles et incertains. Bayrou donne le sentiment d'aimer les gens et a fortiori s'il s'exprime comme il l'a fait hier à Dunkerque avec un langage du coeur qui ne peut que toucher.
C'est aussi une opinion qui ne veut plus des idées mais des tempéraments, des caractères.
En réalité, ce n'est pas seulement une affaire de mode, des facteurs structurels profonds durables expliquent cette évolution.
Tout d’abord, la France est en panne d'idées. Même si elle se refuse à l'admettre, son «modèle» a volé en éclats.
L'opinion refuse encore de regarder en face certaines réalités : le poids de la dette, les conditions de lutte contre le chômage, l'impact durable de la concurrence internationale et probablement aussi l'évolution désormais structurelle à la baisse du pouvoir d'achat.
Mais l'opinion sait que les révisions déchirantes sont incontournables. Donc elle recherche le candidat qui sera capable de la mener en limitant le plus possible la "casse humaine". Pour cela, il faut connaître la vie de tous les jours et aimer les citoyens.
L'opinion va scruter les coeurs pour chercher le sens de la vérité et le sens de la solidarité raisonnable.
C'est actuellement la valeur ajoutée de Bayrou. C'est actuellement le point faible de Dominique de Villepin. Il ne parle pas assez de la vie de tous les jours, de lui, de son parcours, des valeurs qui l'animent. Le temps des propositions est fini. Bayrou a ouvert le temps de la vie, de la réflexion, voire même hier celui de la confession à l'exemple de l'anecdote sur la façon dont son père était traité...
C'est ce langage du coeur que l'opinion attend. Si Bayrou continue à l'exprimer aussi bien et Villepin aussi peu, le choc deviendra trop inégal et Bayrou va écraser non seulement l'espace du centre droit mais aussi celui de la droite déçue.