J - 36 : Elections américaines ou le style comme programme
En France, les discours ou les arguments d’une campagne électorale font l’objet d’une préparation souvent méticuleuse. A l’opposé, bien peu de candidats se préoccupent d’identifier les gestes qui porteront les messages définis. Or ces gestes jouent un rôle fondamental probablement beaucoup plus important que le contenu même du message.
Ils définissent un style et ce style a de plus en plus souvent valeur de ... programme.
5 supports sont le socle des gestes des candidats.
Le 1er élément est relatif aux vêtements. En France, le vêtement est porteur de significations sociales. Progressivement, les responsables politiques français ont évolué vers une sorte « d’uniforme » comportant un code très admis : costume-cravate, couleurs sombres, chemise bleue… Cette évolution est d’autant plus étonnante que cette uniformité tranche avec la diversité qui est désormais de règle dans la société.
La profession politique a des vêtements qui revendiquent davantage l’appartenance à une élite que la recherche du simple confort corporel ou du naturel. Cette situation comparée aux campagnes américaines est un clivage majeur. A l’exception de circonstances très officielles, il est désormais admis aux Etats-Unis que le vêtement sera soit un outil de confort soit un message de proximité mais pas un symbole visuel d’appartenance à une élite donc une marque de « fracture ».
Le deuxième élément fondateur de l’image de marque concerne la démarche. Tout candidat américain doit dégager une énergie débordante par une démarche qui occupe l’espace. Le corps est souple. Il avance fermement vers une direction claire. « C’est la force en marche ». La démarche française est souvent différente. Elle est raide et régulière semblant occuper un espace restreint. Les américains ont coutume de dire que les français donnent toujours l’impression de traverser un « corridor étroit ». La tête est souvent en avant comme si c’était elle qui guidait l’ensemble du corps.
Cette situation est à l’opposé des travaux que tout candidat américain effectue minutieusement sur sa démarche avec ses conseils externes.
Le troisième élément fondateur de l’image de marque concerne la figure et le regard. Dans son comportement, l’homme politique français doit attacher une attention particulière à l’expression témoignée par son visage et par son regard. Ce sont des vecteurs privilégiés de sentiments. En 1974, Valéry Giscard d’Estaing avait été le 1er homme politique à jouer autant sur la « morale du corps » y compris en utilisant l’expression « regarder la France au fond des yeux ». Cette expression va réapparaître lors du débat présidentiel de 1988 lorsque Jacques Chirac devait demander à François Mitterrand de lui confirmer une décision « les yeux dans les yeux ».
Le quatrième élément fondateur concerne les mains. En France, les mains ne se cachent pas. Toute l’éducation est axée sur l’apparence des mains. Les mains « sous la table » sont un signe de mauvaise éducation. De même pour les mains qui sont dans les poches lors d’une discussion.
Lors d’une réunion publique et a fortiori lors d’un débat, les mains sont un outil important d’expression.
Le cinquième élément concerne de façon plus globale la « morale du corps ». Le corps est aujourd’hui considéré comme l’expression de l’ensemble d’un style ou d’un tempérament. Le corps et l’esprit ne sont plus perçus comme séparés l’un de l’autre. En France, il s’agit là d’une révolution majeure car la France a longtemps été un pays où non seulement les activités physiques étaient séparées de celles de l’esprit mais encore les apparences physiques étaient peu valorisées par rapport à l’esprit.
Cette situation s’est totalement inversée.
Le physique, ou plus généralement le style, est ainsi devenu l’esprit en surface.
Un esprit dont on se méfie d’ailleurs de plus en plus s’il se limite à des mots ou à des messages purement conceptuels.
Le style d'un candidat c'est maintenant ce qui tient lieu de programme. A l'exemple de la vidéo ci-dessous de Mia Love.
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