Les affaires ouvrent-elles une nouvelle donne dans la politique française ?
La morale et la politique ont souvent eu des relations conflictuelles. Tout en affirmant un certain idéalisme, le pouvoir semble transgresser régulièrement la morale. Mais globalement dans le temps, les régimes et les hommes politiques ne résistent pas au reproche durable d'immoralité.
La III ème République a été emportée par les affaires Stavisky et Dreyfus. La IV ème République a été très déstabilisée par l'affaire des piastres, celle du bazooka, les "ballets roses". La V ème République a été secouée par des scandales comme la Garantie Foncière, Aranda, l'affaire Marcovitch ...
Toutes ces affaires semblent "secondaires" face à celles actuellement connues et a fortiori face au rythme qui n'est plus celui d'une vulnérabilité ponctuelle publique ou privée mais ce sentiment nouveau d'une fatalité de l'immoralité du pouvoir.
Or, autant l'opinion peut éventuellement accepter cette immoralité publique pour des raisons d'intérêt public comme on peut le constater aux Etats-Unis dans les débats actuels sur les droits privés et les contraintes de lutte contre le terrorisme, autant en France les scandales sont d'une toute autre nature dans des contextes très différents.
Ce sont des scandales privés liés à l'argent dans des circonstances où le pouvoir est inefficace pour lutter contre une crise qui érode le pouvoir d'achat. C'est ce cumul de facteurs qui devient explosif.
Il y a quelques années au moment de l'avoir fiscal de Jacques Chaban - Delmas où une légalité éloignée de la morale partagée (dossier de l'avoir fiscal) pouvait ruiner une carrière présidentielle.
Aujourd'hui, il est question d'illégalités qui semblent très éloignées de toute morale partagée (DSK, Cahuzac, prochains procès de financements politiques du PS, doutes sur Guéant, conditions d'indemnisation de Tapie et procédure devant la CJR ...) : dans tous ces cas, l'argent semble roi emportant tout sur son chemin.
C'est ce constat qui agresse l'opinion.
Le mensonge froid de Cahuzac a ajouté de la crise à la crise comme si désormais mentir "les yeux dans les yeux" pouvait devenir la règle.
Le focus Ifop sur les Français et les affaires montre qu'une étape a été franchie dans de nombreux domaines avec des chiffres qui ne sont dans la lignée d'aucune tendance classique même en pleine période de crises passées.
Une donnée nouvelle est en train de s'installer.