La campagne de Nicolas Sarkozy (Edito 56)

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La campagne présidentielle active qui s'ouvre pour le Président de l'UMP s'annonce ouverte, difficile et à hauts risques. Elle est ouverte, car une nouvelle opinion publique est née. Elle a beaucoup gagné en autonomie. Elle vit le zapping non pas comme une preuve d'instabilité mais comme un témoignage de liberté et de maturité. En conséquence, les dernières semaines de la campagne seront décisives.

Elle est difficile, car le bilan du Gouvernement est mitigé. Le souhait de victoire accompagne actuellement davantage la gauche que la droite. L'assise sociologique de la droite, voire même l'assise politique, s'est réduite. Le tournant a été sociologiquement le printemps 2006 qui a marqué un réel décrochage entre le Gouvernement emporté par les crises multiples (CPE, EADS, Clearstream?) et une large assiette dans l'opinion publique. Ses soutiens sont devenus très marqués : personnes de + de 55 ans, hauts CSP.
Sur le plan purement politique, il est incontestable que la guérilla permanente conduite par l'UDF laisse des traces importantes. Une fracture est née chez une partie de l'électorat UDF.

Elle est à hauts risques, car c'est la première élection des "cadets" de chaque grande formation politique. Seule l'éventualité du retour de Lionel Jospin au PS pourrait changer cette donne. Au sein de l'UMP, le leadership de Nicolas Sarkozy est établi. La campagne électorale de 2007 établira une nouvelle hiérarchie entre les "cadets" ou, en cas d'échec, ré-ouvrira le jeu.

Dans ce contexte, la campagne électorale de Nicolas Sarkozy paraît dominée par le défi des 3C :
- confiance,
- courage,
- coeur.

La confiance, c'est l'assurance pour l'opinion publique que l'intéressé a globalement l'aptitude pour la fonction et que le cap promis sera respecté dans l'ensemble. Cette étape a été franchie par Nicolas Sarkozy. L'opinion ne doute pas de ses capacités et probablement encore moins de sa détermination à respecter des engagements majeurs.

Le courage, c'est faire prévaloir l'intérêt national sur des calculs politiques, sur des engagements partisans, sur des recettes démagogiques. Nicolas Sarkozy veille à replacer son combat pour la sécurité dans cette perspective du combat exigé par l'intérêt national. Les dernières enquêtes d'opinion montrent qu'il y a désormais un accord large à hauteur de 70 % de l'opinion sur des mesures fortes en rupture avec les pratiques passées. Là aussi, une nouvelle opinion est née.

En ce qui concerne le coeur, c'est le vrai dernier défi qui attend Nicolas Sarkozy. D'abord, il s'agit d'un "complexe" séculaire de la droite (bonne gestionnaire) face à la gauche (générosité imaginative). Mais surtout, les mesures pour franchir les étapes ci-dessus exposées l'ont souvent éloigné de cette qualité de coeur. Cette qualité est pourtant un référent important pour des catégories électorales majeures. Lors de l'Université d'été de Marseille, une première inflexion a été apportée notamment par l'importance du volet sur la formation vécue comme une "chance permanente". Mais tant le contenu que le ton n'ont pas apporté encore les corrections nécessaires. Le vrai défi de Nicolas Sarkozy pour acquérir cette qualité de "coeur" est double. Il réside dans son rapport au contenu de la protection sociale moderne et le statut qu'elle reconnaît aux "faibles". Mais surtout, il réside dans le code visuel qui entoure Nicolas Sarkozy. Aujourd'hui ce code visuel imprime l'image de la "toute puissance" : depuis la montre Breitling jusqu'aux relations. C'est la France qui gagne. La France qui loue l'énergie, la compétition internationale. Il doit redéfinir son code visuel pour l'adoucir, l'apaiser, le rendre moins "golden boy". En évoluant ainsi, il dissipera l'inquiétude qui entoure souvent sa personnalité.

C'est probablement ce dernier défi qui est l'ultime obstacle sur son chemin vers la victoire. L'opinion française n'est pas en attente de "printemps libéral". Elle se cherche une modernité douce qui puisse la rassurer. Pour elle, le Président peut être le dernier filet de sécurité vers cette "modernité douce". Nicolas Sarkozy incarne déjà la modernité. Reste la douceur ...

  • Publié le 12 septembre 2006

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