MoveOn.org et la vraie guerre des pétitions
L'actuel enjeu stratégique, c'est la qualité des bases de données. Plus une base de données est quantitativement importante mais surtout qualitativement renseignée, plus sa valeur est considérable. C'est ce qui a conduit MoveOn.org à devenir une "machine à pétitions".
Moveon.org marque une double évolution dans le fonctionnement institutionnel :
1) il ne faut pas changer la politique mais un domaine mais tout le système,
2) le levier pour ce changement, ce n'est pas le Pouvoir mais le citoyen.
MoveOn est une association dont l'action repose sur deux postulats :
- le citoyen est toujours plus important que l'élu. C'est le citoyen qui est à la base de tout. C'est lui qui fait et détient le pouvoir,
- pour que le citoyen puisse exercer convenablement ses droits, c'est-à-dire se prononcer en totale connaissance de cause, il doit être "averti".
Le "citoyen averti" est à la démocratie ce que le "consommateur averti" est à la consommation quotidienne.
C'est celui qui sait déchiffrer les fausses promesses, poser les bonnes questions, ne se laisse pas piéger par les annonces racoleuses…
Mais comment construire "un citoyen averti" ?
Sous cet angle, c'est simple. Il s'agit d'abord de dénoncer les "complots du concurrent".
Il s'agit ensuite d'appliquer la "publicité comparative".
En ce qui concerne la notion du "complot", l'axe consiste à dénoncer publiquement les comportements qui portent atteinte à la considération des consommateurs ou des citoyens.
Les premiers pratiquent alors le boycott des produits désignés pour cibles.
Les seconds votent contre les candidats ou contre les responsables qui ne respectent pas certaines valeurs.
Aux USA, cette logique crée une véritable dictature du consommateur ou du citoyen et malheur à l'entreprise ou à l'élu qui entre dans le collimateur de groupes de pression.
Cette clameur est d'autant plus redoutable qu'elle ne vise pas toujours à établir une stricte matérialité des faits mais à convaincre que le vrai est révélé.
C'est la différence entre "l'objectivement probable et le subjectivement certain".
Dans une époque qui se dit scientifique, la place de ce que le groupe social croit vrai n'a probablement jamais été aussi grande.
Le réel importe moins que ce qu'on croit qu'il est.
Là réside tout le danger et toute la perversité éventuelle des campagnes de MoveOn.
Elles constituent une structuration du corps social et le rendent ensuite quasi imperméable à des considérations plus objectives.
Pour conduire cette information, MoveOn recourt à la "publicité comparative". De nombreuses comparaisons peuvent intervenir en politique.
Il est ainsi possible de comparer :
- les déclarations et les actes,
- les bonnes intentions et les votes,
- les chiffres officiels et des statistiques d'autres sources,
- les résultats d'un Etat et ceux des voisins,
- les résultats d'une période donnée et ceux d'une période antérieure,
….
Cette culture de la mobilisation suppose non plus de mener des campagnes massives généralistes. Mais de s'adresser aux bonnes cibles. L'enjeu est alors double :
- comment identifier les bonnes cibles,
- comment toucher les bonnes cibles.
Les pétitions deviennent le moyen de cette nouvelle logique. La pétition permet de renseigner une base de données. Elle devient une "munition" à multiples coups. Une logique qui n'a pas encore beaucoup pénétré la vie publique française.