Grenoble : Emilie Chalas lance les municipales de 2020
Une page entière dans un quotidien régional pour qu'une Députée LREM, Emilie Chalas, se positionne en "gardienne de la vérité" face au Maire sortant et aux membres de son équipe municipale : quoi de plus ou plutôt quoi de mieux pour lancer une municipale dans un contexte local particulièrement inédit ?
Cette étape ouvre surtout un pré-sprint sur Grenoble à 820 jours des prochaines élections municipales. Chaque parti a ses problèmes à régler. D'où un contexte très particulier.
Pour Eric Piolle, il s’agit de faire vivre une nouvelle génération capable d’accréditer l’idée que des inflexions sérieuses peuvent être données sur des sujets qui ont impacté négativement son 1er mandat comme l’insécurité. Eric Piolle ne manque pas d’atouts. Les conseils de quartiers, les budgets participatifs ont fait naître un vivier de talents susceptibles d’être mobilisés avec efficacité. Ils sont déjà très présents sur les réseaux sociaux. Souvent universitaires, ils ne manquent pas d'atouts chiffrés, argumentés ...
Pour le PS, c’est l’inconnue totale. Sans leader local. Des troupes très faibles. Si une union large des gauches règne sur le plan national, comment le PS local pourrait-il alors se dissocier de cette ligne face à la seule municipalité Verte d’une ville de plus de 100 000 habitants surtout en l'absence de leader local manifeste ? Quasi-impossible sans faire vivre un casus belli national sérieux.
Pour la droite traditionnelle, elle doit trouver les moyens de regagner en crédibilité. Les chiffres sont terribles pour elle sur Grenoble :
- 1995 : la droite fait 31 % au 1er tour sur Grenoble,
- 2001 : la droite fait 34 % ¨au 1 er tour sur Grenoble,
- 2008 : la droite fait 28 % au 1er tour sur Grenoble (en pleine vague rose),
- 2014 : la droite fait 20 % au 1er tour sur Grenoble (en pleine vague bleue favorable à la ... droite !) avec une tête de liste, Matthieu Chamussy, proposée par Bernard Accoyer à l'admission de la commission des investitures.
Pour le parti présidentiel En Marche, la naissance très soudaine des députés La République en Marche, à l’exception d’Olivier Véran, prive ce parti de “locomotives” installées. Et si le PS reste ancré à un pole traditionnel des gauches tandis que la droite reste dans une logique d’opposition classique, l’espace risque d’être fragile. Pour que le parti présidentiel trouve un espace local, il faut plusieurs conditions pratiques :
- qu’il installe rapidement un leader confortant sa notoriété personnelle (Stéphane Gemmani ?),
- que ce leader parvienne à détacher une partie du PS de tout ancrage dans la gauche traditionnelle. De même pour une partie de la droite et en ajoutant un pole société civile. Cela fait beaucoup de conditions pour une nouvelle donne locale ... Chaque semaine qui passe sans que ce “travail d’Hercule” ne soit engagé rend la tâche de plus en plus difficile. C'est probablement ce constat qui a conduit Emilie Chalas à accélérer la course. Sous cet angle tactique, c'est bien vu. Elle a un parcours professionnel qui montre son intérêt pour les collectivités locales puisqu'elle a été DGS d'une ville moyenne à la différence d'Olivier Véran, plus conceptuel et surtout passionné par les sujets nationaux. Elle peut introduire trois facteurs de nature à introduire une nouvelle donne :
- c'est une femme et Grenoble n'a jamais eu de femme maire, c'est un volet qui peut désaligner le scrutin,
- elle est jeune : 40 ans face à Eric Piolle (44 ans),
- elle est "neuve" car elle a gagné la circonscription de Michel Destot dès sa première candidature là où bon nombre d'autres postulants alignent déjà de nombreuses candidatures malheureuses.
Pour la société civile, il faut tirer les leçons des scrutins passés. Sans la participation d’un parti politique traditionnel dans une liste conduite par un membre de la société civile, l’opération est très délicate. Ce qui explique probablement qu’actuellement des candidats potentiels société civile sur Grenoble semblent opter pour une candidature sur des lieux autres que Grenoble à partir d’une résidence principale ou secondaire.
Ces constats montrent aussi que cette période qui s’ouvre n’est pas nécessairement défavorable au pouvoir sortant. C’est “l’étape des comparaisons” qui s’ouvre. Dans cet esprit, c’est une question différente qui naît : “changer oui ? Mais pour qui d’autre ?”. Et c’est l’étape de la construction du “qui d’autre” qui vient manifestement de s'engager.