Julien Benda : 95 ans plus tard ...
Quelques ouvrages sont des fondamentaux intemporels. En 1927, Julien Benda publiait un ouvrage remarquable : la trahison des clercs. Le sujet : la trahison d'intellectuels et de "relais d'opinion" qui travestissent des faits pour les instrumentaliser afin qu'ils servent leurs propres options partisanes. Ils devraient d'abord servir la vérité, la lucidité. Loin s'en faut, ils servent leurs intérêts, leurs options partisanes. Alors même que l'éthique devrait les conduire à toujours dissocier les faits et leurs commentaires personnels.
95 ans plus tard, les sujets ont changé mais les intentions d'instrumentaliser sont plus vives que jamais. La trahison déforme. Elle met surtout des couches de blanc sur des sujets pourtant incontournables : la dette, l'inflation, l'identité, des violences inqualifiables qui deviennent pourtant des voisines du quotidien ... Ce "blanchissement" de réflexions est peut-être encore plus grave que la déformation de faits, d'expressions.
Ce climat est le marqueur de crises d'une extrême gravité. Edgar Morin a eu une remarquable définition de la crise : "La crise nous rend plus fous et plus sages. Une chose et une autre. La plupart des gens perdent la tête et d'autres deviennent plus lucides. La crise favorise les forces les plus contraires."
Faut-il que des faits inquiètent à ce point pour qu'ils soient cachés aussi méthodiquement actuellement sous une couche de blanc...