Nicolas Sarkozy face à l'absence de réserve de patience

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Nicolas Sarkozy enregistre des scores modérés de persuasion suite à son émission télévisée. C'est le fait d'une opinion qui a épuisé ses réserves de patience.

Nicolas Sarkozy a tenu une émission classiue, sérieuse, sans remise en question fondamentale.

L'univers global de communication est aujourd'hui composé de 4 tendances lourdes.

1ère tendance : les multi-vies. La grande question du jour est : combien de vies vais-je avoir et non plus quelle vie vais-je avoir ?
Combien de vies professionnelles ?
Combien de vies familiales ? Combien de vies géographiques ? ...

Ce nouveau sentiment engendre un besoin d'humilité. Alors que chacun se pose beaucoup de questions sur sa propre existence comment faire confiance à quelqu'un qui prétendrait connaître voire maîtriser l'existence collective ? Cette tendance tord le cou aux discours simplificateurs annonceurs de chemins simples uniques durables.

La seconde tendance est la fin de l'impersonnalité du discours. Puisque celui qui me parle n'appartient plus à une élite crédible pour me dire de quoi demain sera fait ni pour apporter les réponses aux problèmes du présent qui le rendent manifestement impuissant, celui qui parle doit démontrer que sa vie personnelle porte suffisamment d'expériences multiples pour lui permettre de comprendre la diversité des situations susceptibles d'affecter autrui. C'est la nouvelle proximité.

La tradition du discours français reposait sur l'intellectualisation. Comment intellectualiser ce que l'on ne connaît pas car l'avenir est perçu comme inconnu ? Les citoyens s'en remettent moins aux mots. Ils aspirent à connaître l'identité de l'individu : ses expériences c'est-à-dire son histoire, ses échecs, ses succès, sa façon de vivre. Tout ce qui "impliquant" et qui permet de se faire une idée sur un être. Il importe donc de répondre à cette attente. La conception péjorative de cette évolution consiste à la qualifier "d'infos people". La réalité, c'est que le citoyen attend un nouveau style d'expression et de communication qui lui permette de mieux connaître celui qui le représente ou qui aspire à le représenter. C'est une revendication de sens au-delà des "discours officiels". "Par sa vie, cet individu peut-il comprendre la mienne, mes questions, mes doutes, mes aspirations ?" : c'est ce rapport impliquant qui est attendu.

Dans un monde complexe et contradictoire, cette observation est un vrai facteur d'explication d'un être que les citoyens cherchent à d'autant plus comprendre que les idéologies sont vides de sens.

Parce que la société d'aujourd'hui et a fortiori de demain est faite de menaces généralisées à un point tel qu'il est aujourd'hui admis qu'elles viendront de domaines inimaginables à ce jour, les citoyens ont besoin de repères nouveaux.

Ces nouveaux repères sont la vertu des temps modernes, troisième tendance forte. Cette vertu, c ?est un code moral (rigueur, respect de l'autre, respect de l'avenir?) bien davantage que des règles précises. Là aussi, il importe donc de satisfaire à cette attente. C'est la définition d'un tempérament qui est le gardien des décisions ultérieures. La mode des programmes détaillés est passée. Elle correspondait à une époque où il était admis que le futur soit prévisible voire même planifiable. Cette époque est terminée. Il ne s'agit pas de promettre des mesures concrètes mais de communiquer une éthique globale qui est la grille de lecture des décisions à venir.

Enfin, dernière tendance majeure, la reconnaissance d'une valeur d'usage. Un responsable public comme un produit doit remplir la fonction pour laquelle il existe. Seuls pourront espérer durer ceux qui respectent cette valeur d'usage, cette efficacité, cette utilité pratique. Si cette valeur n'existe pas, on zappe en passant à une autre offre qui à son tour sera soumise à la même exigence. Cette tendance est commune à la consommation et à la citoyenneté.

Ces quatre tendances construisent l'univers des citoyens Français. Ceux qui ignorent ces tendances auront du mal à rencontrer l'attention de leurs concitoyens.

C'est le cas de Nicolas Sarkozy qui s'éloigne de plusieurs repères majeurs dont la valeur d'usage.

Le pouvoir d'achat est une redoutable torture, chaque jour et même plusieurs fois par jour.

Faute de valeur d'usage sur un dossier de ce type, c'est l'ensemble de la communication qui en est déstabilisée voire emportée.


  • Publié le 26 avril 2008

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