Xavier Bertrand face à une UMP paralysée
A moins de 60 jours des Européennes, l'UMP n'est toujours pas en ordre de bataille.
La véritable percée de Xavier Bertrand sur la scène politique nationale date de sa désignation comme porte-parole de Nicolas Sarkozy pour la Présidentielle 2007 en ticket avec Rachida Dati.
Un ticket qui fut un véritable coup de maître en matière de communication.
En effet, le candidat à la Présidentielle connu pour des déclarations tranchées notamment dans le domaine de l'immigration choisissait comme représentants un homme tout en rondeur supposée apaisante et bon enfant mais aussi une jeune femme issue de l'immigration mais terriblement bien intégrée. Ce visage quotidien de l'équipe Sarkozy devait compter pour beaucoup dans le succès.
Xavier Bertrand est né le 21 mars 1965. Agent d'assurance ayant connu un parcours militant en prise directe avec le terrain, Xavier Bertrand a eu ensuite un cursus ministériel très complet dont la gestion du dossier des régimes spéciaux de retraites.
Xavier Bertrand est devenu l'un des personnages emblématiques de la "génération terrain" présente aux côtés de Nicolas Sarkozy alors même qu'il fut à l'origine un proche d'Alain Juppé.
Pour l'opinion, Xavier Bertrand est d'abord un physique de rondeur et une expression pleine de douceur.
C'est donc une apparence très différente de celle du Chef de l'Etat.
Sur le fond, il doit faire face à un triple défi :
- comment garder les classes populaires dans la majorité présidentielle ?
- comment faire vivre l'UMP sans la limiter à une fonction de soutien sans limite de la voix du Président de la République ?
- comment porter de nouvelles priorités pour les prochaines échéances ?
Les classes populaires quittent la majorité présidentielle. Elles n'ont pas encore choisi leur nouvel ancrage. Mais l'heure du départ a sonné. Ce départ n'est pas d'abord un enjeu de politique c'est surtout une réprobation d'attitudes du Chef de l'Etat. C'est un tempérament qui choque davantage qu'une politique qui irrite. Avec la personnalisation présidentielle, la première tâche du maintien des classes populaires dans le giron présidentiel paraît impossible donc perdue.
La seconde tâche est également très difficile : comment faire exister l'UMP ? Dans la vie politique actuelle, la querelle est le meilleur support pour se distinguer donc exister. Mais l'UMP ne peut nourrir la querelle contre le Président. Par conséquent, le créneau de la querelle perd de sa force surtout en période de faible visibilité de l'opposition.
Il reste donc l'enjeu des prochaines échéances électorales. C'est là que Xavier Bertrand peut trouver toute sa valeur ajoutée en devenant le Chairman de l'UMP.
Dans cette conception, son rôle consiste à transformer l'UMP en mécanique performante de compétition électorale. C'est admettre une fois pour toutes que son rôle est purement logistique. C'est une instrumentalisation d'un parti politique qui devient un cadre d'organisation. C'est une fonction qui ne correspond pas à l'histoire des partis politiques Français. Mais c'est peut-être l'âge moderne des partis politiques que cette évolution à l'Américaine.
Et si la valeur ajoutée à terme de Xavier Bertrand consistait à vendre du silence en organisant la vocation utilitaire de l'UMP ? A la tête de l'UMP Nicolas Sarkozy vendait du bruit quotidien par le contenu des messages comme par leur expression souvent provocante.
Cette approche est pratiquement impossible et peut-être même dépassée. Et si Xavier Bertrand vendait maintenant du silence, ne protègerait-il pas son propre avenir de la façon la plus efficace tout en empruntant la seule voie possible pour faire vivre l'UMP ?
S'il ne veut pas céder au complexe du Prince de Galles, il doit définir une fonction ambitieuse qui ouvre demain le maximum de perspectives. Il lui incombe probablement de créer le parti politique moderne sous la Vème République si hostile aux partis politiques.
Est-ce encore possible après une sévère défaite aux Européennes obtenue sans même avoir livré combat ?