Ségolène Royal a soif d'un nouvel idéal
Une fois de plus, la leader socialiste se positionne en remarquable analyste de tendances. Elle ouvre deux nouveaux champs : le "pouvoir citoyen" et "l'âge de faire local" pour affirmer un besoin de nouvel idéal individuel comme collectif.
C'est une préemption importante que vient d'opérer la candidate socialiste dans deux nouveaux domaines.
Le premier est le territoire de "la preuve locale". Elle définit cet axe comme l'étape quasi-qualificative pour s'occuper du national. Comment prétendre à faire à l'échelle d'un pays si l'intéressé n'a pas été capable de réussir à l'échelle d'une région, d'une ville ou d'un département ?
Ce constat de bon sens doit faire mouche. Il correspond pleinement à la logique déjà constatée dans de nombreux pays dont les Etats-Unis où la réussite territoriale (fonction de Gouverneur tout particulièrement) crédibilise un cursus. Avec cette approche, elle change le "champ des possibles"; ce n'est pas le discours politique qui ne dupe plus personne mais c'est l'expérience de proximité.
Le second "territoire" est celui du "pouvoir qui corrompt". Ségolène Royal amorce une nouvelle logique d'exercice du pouvoir. Sa campagne 2007 avait été celle du relationnel. La prochaine pourrait être celle d'un nouvel idéal de pouvoir. Cette logique est au coeur d'une tendance récente profonde. Une nouvelle vision du pouvoir est attendue. Cet idéalisme appliqué au pouvoir mieux contenu et davantage respectueux des libertés individuelles est tout particulièrement attendu par les jeunes et les cadres, catégories décisives pour les bons scores du PS...
La bataille culturelle est ouverte. Ségolène Royal vient de prendre date en ouvrant deux concepts encore peu occupés dans la vie politique française mais qui augurent d'espaces considérables de nouveaux positionnements. Du grand professionnalisme qui devrait inspirer davantage de modération et de réflexion à bon nombre de ses détracteurs très à l'écart de telles considérations de fond.
C'est un tournant majeur qui annonce une campagne délibérément idéaliste en rupture avec le consumérisme ostentatoire. C'est le "conscientious living", style de vie empreint de recherche de sens et d'acceptation des différences individuelles supposé tourner la page du consumérisme ostentatoire (bling bling). Obama a occupé cet espace en 2008.
Il faut de l'idéalisme pour le pouvoir (respecter les nouvelles libertés individuelles) et du réalisme (acquis sur le terrain : "la preuve locale") pour ne pas se leurrer : un "bon profil" qui ressemble beaucoup au sien.