Michel Destot doit affronter la colère liée à des embouteillages monstrueux à Grenoble
Les travaux de la ligne E du tram mettent actuellement le feu aux poudres dans l'ensemble de l'agglomération grenobloise. La colère est partout face à une agglomération durablement paralysée. Tous les horaires sont modifiés par des bouchons sans précédent.
Pendant longtemps, la politique des transports publics urbains dans l'agglomération grenobloise avait bénéficié d'un consensus entre les formations politiques. Le temps du consensus est fini entre l'opinion et cette politique.
Le consensus a existé parce que le tramway dans l'agglomération a été décidé par la droite puis poursuivi par la gauche. Dès la fin du premier semestre 1980, René Michal répond aux invitations d'Hubert Dubedout en installant une commission tramway au sein de la Chambre de Commerce et d'Industrie co-présidée par MM Cavard (alors Secrétaire Général de Merlin Gerin) et Dumas (alors représentant des transporteurs privés). Pendant plus d'un an, cette commission va faire le point, voir ailleurs les expériences déjà engagées (Nantes, villes allemandes ...). Progressivement, la Chambre de Commerce se fait à l'idée. Son "soutien" sera important pour éviter une fronde face à l'augmentation de la taxe versement transports qui va peser sur les entreprises pour le financement du tramway.
En 1983, Alain Carignon s'engage pour un tramway intra-urbain et organise le referendum du 22 juin 1983 qui voit les Grenoblois décider massivement en faveur du tramway intra-urbain.
Puis à partir de 1995, Michel Destot décide d'extensions progressives. Cet historique montre le socle du consensus qui s'exprimait dans les instances avec la co-décision des deux spécialistes du transport public dans l'agglo : MM Descours (RPR) et Biessy (PCF).
Mais aujourd'hui, trois échecs majeurs sont nés :
1) L'échec du sens des transports publics urbains : ils devaient fluidifier le trafic. Or, l'agglo est asphyxiée. Pourquoi cet échec ? Parce que les transports publics urbains n'ont pas été accompagnés par un aménagement cohérent des territoires ni par le développement des voies pour les automobiles. Dès 1993, cette logique globale indispensable a été affirmée par l'Agence d'Urbanisme. Elle a été confirmée en 1998. Faute d'être mise en oeuvre, l'actuelle congestion est née.
2) L'échec d'un modèle de qualité sécurisée : les transports publics urbains sont victimes de l'insécurité qui y règne. Leur image de marque a considérablement perdu en qualité ces dernières années. Si bien que, pour de nombreuses personnes, il est désormais hors de question de prendre les transports publics urbains.
3) L'échec d'un modèle financier : le réveil de l'agglomération grenobloise sur le poids de sa dette s'annonce redoutable. La seule Ville de Grenoble a aujourd'hui une dette cumulée réelle de l'ordre d'un milliard, 5 d'euros. C'est l'assiette probable de tous ses engagements tous périmètres confondus y compris les garanties d'emprunt de Minatec. Ce montant est l'équivalent de la dette du département du Nord qui est le plus peuplé de France et qui compte ... 2 500 000 habitants. 170 000 habitants portent une dette publique locale probablement égale à ... 2 500 000 habitants pour un Département présenté comme asphyxié financièrement !
C'est la totalité de l'aménagement de l'espace dans l'agglomération qui doit être redéfinie. La logique de développement des territoires doit être refinalisée et les voies de circulation comme les différents modes de transports doivent être adaptés en conséquence.
L'inversion de ce processus pour placer le débat sur les moyens de déplacements et non pas sur les logiques d'objectifs à atteindre à conduit à l'actuelle congestion.
Ce débat de fond avait été ouvert dès le début des années 80. A la lumière des enseignements d'alors la logique intra-urbaine avait été préférée à la logique péri-urbaine. Cette dernière supposait une déconcentration préalable de nombreux équipements administratifs et économiques. Elle a été abandonnée et le désordre actuel a progressivement pris naissance pour atteindre des niveaux insupportables parce que les modes diversifiés de déplacements n'ont pas évolué en même temps et que les déséquilibres des territoires ont trop progressé.
La ligne E du tram ne règle rien. Pendant les travaux, elle est une étape de plus dans la congestion durable de l'agglomération grenobloise. Après, aucune amélioration significative n'en résultera.
En 1984-1985, lors des travaux du tramway, la municipalité Carignon avait lancé "Renard Bleu", premier module interactif à l'époque de conseils pour éviter les embouteillages. Quelques années plus tard, ce dispositif devait inspirer "bison futé" sur le plan national.
Michel Destot doit impérativement mettre en place un dispositif alternatif parce que l'actuelle situation est explosive tant la Ville de Grenoble est totalement paralysée.