Décès de René Michal : forte émotion à Grenoble

Après le communiqué de M. Alain Carignon, ancien Maire de Grenoble, témoignant sa tristesse à l'occasion du décès de René Michal, c'est une forte émotion qui se manifeste à ce sujet.

En effet, René Michal a incarné un volontarisme économique porteur de nombreux résultats.

L’économie grenobloise a longtemps réuni quatre atouts.

Tout d’abord, c’était une économie équilibrée. La réalité économique était beaucoup plus diversifiée que la seule image de Grenoble nouvelles technologies, sciences du futur.

L’agglomération a longtemps su éviter le piège de la mono-industrie. Tous les secteurs étaient représentés. Pendant longtemps, l’industrie grenobloise pouvait se définir d’abord par la négative. Elle comprenait tous les métiers sauf la construction automobile, navale et aéronautique. Cette tradition diversifiée a été son point fort diminuant sa vulnérabilité face aux restructurations brutales.

Second atout : sa réactivité. Son tissu de PME, la place du tertiaire d’entreprise ont été ses leviers principaux de réactivité.

Troisième atout, une région de personnels qualifiés. L’agglomération grenobloise disposait d’une chaîne de formation très performante. Ses trois universités, l’INPG, ses sept écoles spécialisées, son Ecole de Commerce, son Ecole Supérieure des Affaires, ses IUT...ont contribué à l’existence incontestable d’un pôle performant d’enseignement supérieur. La même performance est reconnue quant aux lycées, collèges. L’agglomération a aussi la chance de pouvoir compter sur des laboratoires de qualité dans des disciplines les plus variées.

Quatrième atout et loin d’être mineur, le cadre de vie. C’est un enjeu déterminant dans l’attractivité de l’agglomération. 25 stations de sports d’hiver se situent à moins de deux heures de route du centre ville. La Méditerranée est à trois heures. Les équipements collectifs sont très importants, culturels, sportifs. Bref, pour une société internationale, Grenoble est une géographie accueillante.


Depuis 1970 plusieurs logiques de politiques économiques ont été mises en œuvre par les pouvoirs publics locaux.

De 1975 à 1983, les municipalités Dubedout ont mis en œuvre un «socialisme municipal» classique. Hubert Dubedout a innové comme seuls en France Frêche à Montpellier et Deferre à Marseille ont eu la volonté et la possibilité de le faire. Les collectivités locales se dotent alors d’outils d’interventions bien avant que les lois de décentralisation ne leur en reconnaissent la faculté légale. Le BIEN, la SADI, le Comité d’Expansion, le service municipal d’action économique sont des outils importants des collectivités locales.

Ces outils ont été à cette époque interprétés par les organismes classiques de représentation des forces économiques comme des «leviers illégitimes» d’interventionnisme local et ont contribué à renforcer les tensions avec les organismes consulaires qui, à la même période, ont vécu comme une agression le développement considérable de la grande distribution en périphérie de Grenoble. Chaque CDUC (commission départementale d’urbanisme commercial) était le lieu d’oppositions irréductibles.

De 1983 à 1995, les municipalités Carignon ont installé une autre logique. Le «discours fondateur» a été celui du 12 décembre 1983. Trois orientations se dégagent. La municipalité réaffirme sa priorité au développement diversifié tout particulièrement à destination des PME-PMI. Elle rassemble tous les organismes d’interventions au sein d’un Conseil de Valorisation de l’Economie Grenobloise. Dans une logique plus «libérale», elle considère que l’économie est d’abord le métier des chefs d’entreprises et que donc l’action publique doit aller à l’environnement : voies de communication, grands équipements publics, réseau international des villes…

L’objectivité des chiffres conduit à reconnaître que la politique des grands chantiers a produit des effets très positifs sur l’emploi. Le seul BTP (bâtiment et travaux publics) perdait en moyenne 400 emplois par an. A partir de 1986, la tendance s’inverse pour arriver à un solde positif de création d’emplois de 320 emplois en moyenne par an.

Pendant cette période, les PME (moins de 10 salariés) de tous secteurs ont créé 400 emplois supplémentaires par an de 1984 à 1988 pour franchir le seuil de 500 emplois nouveaux par an à partir de 1988.

Pendant cette période, l’objectif a été placé sur les PME et la diversification.

Cinq intervenants ont joué un rôle majeur.

- René Michal, en qualité de Président de la Chambre de Commerce et d’Industrie, veille à ce qu’une pause soit opérée dans le quadrillage de l’agglomération par la grande distribution.

- Roger Pellat Finet intervient au sein du COVEG et est un porte-parole convaincant des PME-PMI.

- Joël de Leiris, universitaire, renforce les liens avec les Universités, les laboratoires.

- Vincent Rivier, qui à succédé à Michel Destot au Commissariat Général aux Rencontres de Grenoble donne une vision conceptuelle de synthèse des opérations et s’avèrera un très efficace ambassadeur de la Ville de Grenoble auprès des instances nationales.

- Enfin, Pierre Beras, Président du Tribunal de Commerce de Grenoble veille, avec indépendance et autorité, à défendre les entreprises locales contre des manœuvres nationales ou des opérations bancaires irrespectueuses du «climat familial» des entreprises locales. Par certaines décisions et avec l’aide des services spécialisés de l’Etat, il a évité des restructurations qui auraient pesé lourd en termes de suppressions d’emplois à l’exemple notamment de l’offensive menée contre Kis par un concurrent qui ne se refusait aucun moyen. De surcroît, toutes les collectivités locales (Ville, Sieparg et Département) oeuvraient dans la même direction.

Avec le décès ce matin de René Michal, ancien Président de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Grenoble, puis Adjoint à l'Economie auprès d'Alain Carignon, c'est la page de la Capitale du Dauphiné conquérante qui se tourne.

Une époque où Grenoble était le drapeau de l'Isère avec une fierté d'appartenance qui dépassait largement les clivages habituels.

  • Publié le 19 mars 2012

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