UberPop et la fonction du Conseil Constitutionnel : un juge qui gouverne ?
Après la loi Brottes et l'interdiction des coupures d'eau, la décision du Conseil Constitutionnel sur UberPop va rouvrir les débats sur la fonction du Conseil Constitutionnel. Et à travers sa fonction, c'est d'abord l'enjeu de sa composition.
Si le Conseil Constitutionnel doit devenir à ce point le grand régulateur des règles de droit, comment sa composition peut-elle rester aussi politique et aussi peu liée à des juristes reconnus ?
En France, en dehors des procédures judiciaires, il y a une indifférence profonde face à l’exercice d’une fonction de contrôle.
Pris par le temps, disposant de peu de moyens humains ou matériels, connaissant les limites de leur action, anticipant ou exagérant même parfois les limites de ces actions, bon nombre d’autres intervenants ont manifestement abandonné l’idée de contrôle.
Au sein du pouvoir politique, le Parlement a accepté progressivement la prééminence de l’exécutif comme la toute puissance de l’Administration. Cette dernière sait remarquablement bien répondre allusivement et partiellement aux questions dans des conditions qui ne permettent pas un contrôle digne de ce nom.
C’est le cas aussi de la presse qui, en devenant une presse d’opinion, est tombée dans des travers tantôt d’adhésion permanente tantôt de contestation permanente qui, pour cette dernière, altère progressivement l’impact des reproches donc du contrôle aux yeux de l’opinion.
Tout d’abord, il importe de rappeler que l’intérêt du contrôle est justement d’éviter un traitement contentieux qui est long, onéreux, lourd de conséquences graves.
Ensuite, le coût du contrôle est toujours moins élevé que le prix de la faute en l’absence de contrôle.
Enfin, la situation est aujourd’hui tellement grave que c’est le principe même de la fonction de contrôle qui a besoin d’être réaffirmée plus que de la simple adaptation d’une mise en œuvre. Cette situation est révélatrice d’une véritable crise avec la disparition de cette fonction. Le fait majoritaire tout particulièrement a transformé certaines mesures en situations de responsabilités fictives.
La III ème et la IV ème République ont installé un contrôle dans la crise.
La Vème République a voulu établir un contrôle politique sans crise. En réalité, les nouveaux équilibres ont fait naître une véritable crise du contrôle politique qui a ouvert un espace particulier au contrôle juridictionnel qui s’est installé en ultime rempart.
Le Conseil Constitutionnel émerge progressivement dans cette fonction. Pour qu'il l'exerce avec efficacité, deux critères doivent être respectés :
- un raisonnement juridique très sérieux : que la décision soit juste,
- une impartialité incontestable : que la décision soit perçue comme juste.
Or la composition très politique du Conseil Constitutionnel l'écarte de cette image d'impartialité.
Plus le Conseil Constitutionnel est voué à jouer une fonction de "contrôle suprême", plus son impartialité doit être au-dessus de tout soupçon. C'est la composition même du Conseil Constitutionnel qui est vouée à être réformée en profondeur pour devenir une Cour de juristes reconnus et non plus une émanation de désignations politiques.