Grenoble : les faux habits d'une vraie concurrence
Avec la distribution actuelle d'une lettre aux grenoblois dont l'auteur est l'ancien Maire PS de Grenoble, Michel Destot, des relais bruissent déjà sur le thème de la "parenthèse Verte" vouée à être refermée dès 2020. Cette analyse résiste peu à un examen plus en profondeur.
Elle incarne les faux habits d'une vraie concurrence.
Les faux habits, parce que rien ne désigne la victoire d'Eric Piolle en mars 2014 comme ayant vocation à être une ... "parenthèse". Il a été élu parce qu'il correspond à un courant majoritaire dans la Capitale du Dauphiné. Un courant qui est d'abord une alliance entre la "gauche de la gauche", les Verts et des formations associatives. Aux municipales de 2014, cette alliance est allée jusqu'à 29 %. Quand le PS était à 25 %. On n'arrive pas à 29 % par le fruit du hasard.
Et en mars 2014, il n'y a pas eu de hasard. Ce score a été le produit certes d'une campagne marketing très habile. Mais surtout d'un maillage militant de la Ville d'une terrible efficacité. La municipalité PS sortante pensait avoir les "milieux intermédiaires". Elle les avait tous perdus et manifestement. En territoires hostiles même dans les Unions de Quartiers.
Lors des régionales 2015, les Verts ont fait 20 % sur Grenoble quand le PS est monté à 30 %. C'est dire qu'avec le coefficient personnel d'Eric Piolle, les deux gauches sont à égalité dans la zone des 25 % comme d'ailleurs en 2014 si la liste PS avait eu la lucidité de faire liste unique avec le Centre dans la foulée naturelle de leur gestion commune de 2008 à 2014.
Il y a donc une vraie concurrence. Au coude à coude ! Dans cette concurrence, quels sont les marqueurs à suivre ?
1) Le marqueur pour les Verts n'est pas de "dompter les relais" mais de ne pas décevoir leur électorat direct. Ils savent que certains relais ne voteront jamais pour eux. Bon nombre des autres relais dont les entrepreneurs et commerçants ne sont même pas inscrits sur les listes électorales et dans des pourcentages très élevés. Donc, la recherche du consensus est inutile. Par conséquent, à l'opposé de bon nombre des actuelles analyses, la stratégie de rupture assumée par la municipalité d'Eric Piolle est réaliste. Elle crée une vraie différence avec ses prédécesseurs.
2) La "gauche de la gauche" est la seule à produire une grille de lecture des faits locaux. Le Postillon est une réussite remarquable dans une culture libertaire qui correspond particulièrement bien à l'ambiance actuelle de contestation de tous les pouvoirs. C'est un succès de ventes à chaque numéro à en croire les points presse locaux. Gauche Alternative est un périodique très documenté. Non seulement ces deux supports n'ont pas de concurrence, mais ils sont objectivement de réelle qualité. Aucune autre formation politique locale n'a une production intellectuelle "dans la même division". Les deux publications ci-dessus visées sont les seules en version papier.
3) Les Verts peuvent compter sur un réseau militant toujours très efficace. Ils dominent les réseaux sociaux locaux. Le PS, à deux ou trois exceptions près, peine à soutenir la compétition. Cela se constate facilement dans les avis contraires sur des délibérations lors de Conseils Municipaux. Les Verts sont plus offensifs, plus nombreux. Ils ont un ascendant mental actuel sur le PS.
4) Par conséquent, le PS ne semble avoir de chance de reprendre l'ascendant au sein des gauches qu'à la condition d'étendre son périmètre au centre droit et à la société civile. Mais le Centre (Modem 38) est passé chez les Républicains lors des régionales 2015. Et pour le moment, la Société Civile dans sa partie indépendante structurée localement (Nous Citoyens 38, Club 20 ...) reste à l'écart du jeu politique dans son ensemble.
5) Par conséquent, c'est une véritable recomposition politique locale qui doit être organisée pour que des inversions sécurisées de tendances s'opèrent au sein des gauches locales. C'est probablement la vraie raison du calendrier de la lettre de l'ancien Maire de Grenoble, Michel Destot. Montrer qu'il sera bien là aux législatives 2017 et que la recomposition ultérieure devra compter avec sa participation active.